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Les critiques de l'OMS passent mal en Afrique

Georges Ibrahim Tounkara
18 mai 2020

En attendant la découverte d'un vaccin contre la Covid-19, plusieurs traitements locaux font polémique. C'est le cas du Covid-Organics, un traitement présenté par le président malgache, ou de l'Apivirine au Bénin.

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Madagaskar Corona-Pandemie | Covid Organics
Image : picture-alliance/dpa/A. Joe

' Pour nous les critiques de l'OMS ...' - MP3-Stereo

L'assemblée annuelle de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'est ouverte ce lundi (18.05.2020), virtuellement, pour la première fois de l'histoire de l'organisation. Les différents intervenants à cette rencontre ont tous souhaité la découverte rapide d’un vaccin contre le coronavirus. En attendant, plusieurs traitements locaux tentent de freiner la propagation de ce virus.

A Madagascar, le gouvernement fourni le Covid-Organics, une tisane à base d'artemisia, une plante déjà utilisée contre le paludisme. Mais l’OMS reste prudente face à ces traitements locaux, rappelant que leur efficacité n’est pas prouvée. 

Lire aussi → Ruée sur l'artemisia, remède contesté contre le Covid-19

En dépit de ces mises en garde de l'OMS, le président malgache, Andry Rajoelina, continue de promouvoir le Covid-Organics, aussi bien dans son pays que dans le reste du continent. Pour tenter de démontrer l’efficacité du remède, il s’appuie sur les chiffres de l’épidémie à Madagascar. Un peu plus de 300 cas, pour un seul décès.

Le Covid Organics est distribué à de nombreux malgaches
Le Covid Organics est distribué à de nombreux malgachesImage : Getty Images/AFP/Rijasolo

Plusieurs critiques soulignent cependant le manque de preuves scientifiques concernant l’efficacité de ce remède. Mais pour le naturopathe camerounais, Fotsing Linus, il n’y pas que les preuves scientifiques à prendre en compte. "Pour nous, les critiques de l’OMS s’apparentent à un sabotage. Avec la médecine à base de plantes, on parle de l’observation clinique. Il est question de données. Il n’y a pas une étude scientifique à faire", insiste-t-il. "On donne le produit au patient et on l’observe. En quoi l’OMS incrimine le Covid-Organics ? L’artemisia est utilisée depuis des siècles et s’est montré même plus efficace que la chloroquine", explique le naturopathe.

Très remonté, le naturopathe camerounais affirme que l’espérance de vie est plus faible dans les villes africaines que dans les villages où l’on ne connait que la médecine traditionnelle : "Les Européens arrivent au Cameroun au 19e siècle. Pourtant, le Cameroun a toujours existé et les gens soignaient toutes sortes de maladies. Dans nos villages où il n’y a pas de centres de santé, nos parents vivent jusqu’à 100 ans, alors que dans une ville comme Yaoundé, l’espérance de vie se situe entre 50 et 70 ans."

Contre la Covid-19, l'Afrique veut compter sur sa médecine traditionnelle
Contre la Covid-19, l'Afrique veut compter sur sa médecine traditionnelleImage : DW/Nádia Issufo

L'Afrique toujours marginalisée

Pour le président Andry Rajoelina, les réticences de l’OMS envers le Covid-Organics s’expliquent par le fait que ce remède a été élaboré par un pays africain. Une thèse que semble approuver Marius Comoé, le président de la Fédération des associations de consommateurs actifs de Côte d'Ivoire. "Les réticences de l’OMS ne se justifient pas dans la mesure où l’OMS, une fois informée de la créativité de nos chercheurs, ne cherche pas à découvrir, à analyser en profondeur leurs trouvailles. L’OMS ferait mieux de venir en Afrique pour s’informer sur la donne que de rejeter de façon discourtoise leurs trouvailles", s'indigne Marius Comoé.

Pour l'OMS, il ne s'agit néanmoins pas de remettre en cause les effets bénéfiques de la médecine traditionnelle. L'organisation rappelle ainsi qu’elle a soutenu des essais cliniques qui ont amené une dizaine de pays à travers le monde à délivrer des autorisations de mise sur le marché de 89 produits issus de la pharmacopée traditionnelle. Des produits qui répondaient aux normes d’homologation internationales et nationales établies.

Georges Ibrahim Tounkara Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welle