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La Tunisie risque-t-elle de retomber dans la dictature ?

Kersten Knipp | Khaled Salameh | Nafissa Amadou
27 juillet 2021

Symbole de la marche vers la démocratie dans le monde arabe en 2011, la Tunisie semble en train de céder à une dérive autoritaire avec les derniers évènements.

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Le président Kais Saied et son ex-Premier ministre Hichem Mechichi
Le président Kais Saied et son ex-Premier ministre Hichem MechichiImage : Slim Abid/AP Photo/picture alliance

L'Union européenne appelle au "rétablissement de la stabilité institutionnelle dans les meilleurs délais" en Tunisie. En effet, la suspension des activités du Parlement et le limogeage du Premier ministre par le président Kais Saied suscite l'inquiétude de la communauté internationale, consciente de la fragilité de la démocratie tunisienne, un peu plus de dix ans après la mobilisation du Printemps arabe.

La Tunisie, berceau de ces évènements en 2011, est considérée comme le seul pays à avoir vraiment réussi une transition démocratique après la chute du régime autoritaire de Ben Ali. 

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Discussion entre juristes

Mais avec la décision du président Kais Saied de limoger le chef du gouvernement et suspendre les travaux du parlement, l’activiste et avocate tunisienne Sana Ben Achour parle d’un "jour noir" dans l'histoire de son pays.

Au micro de la DW, elle affirme que la Tunisie est menacée par une dictature. Un avis que ne partage pas le professeur en droit public, Rabeh Kraifi.

Les juges constitutionnels tunisiens n'ayant pas encore été élus, seul le président aurait le droit d'interpréter la Constitution. Parlant de l’article 80 évoqué par Kais Saied, Rabeh Kraifi estime donc que sa décision est légalement couverte. 

Des milliers de Tunisiens ont crié leur joie dans la rue après les annonces du président.
Des milliers de Tunisiens ont crié leur joie dans la rue après les annonces du président. Image : Yassine Mahjoub/imago images

Des espoirs déçus

La décision du président semble être accepter par une partie des Tunisiens qui ont bravé le couvre-feu dès dimanche soir (25.07) pour manifester leur joie.

Johannes Kadura, de la fondation allemande, Friedrich-Ebert en Tunisie, affirme que cette célébration s’explique par le fait que "la population est mécontente du gouvernement, principalement du parti islamiste modéré Ennahdha. Depuis la révolution, la situation économique de la population ne s'est pas améliorée. Ainsi, une grande déception se répand. En outre, les parlementaires et aussi le gouvernement sont considérés comme corrompus et non fonctionnels."

Johannes Kadura ajoute que "Saied se présente comme une personne impartiale qui considère la lutte contre la corruption comme sa tâche principale. Il veut faire évoluer les circonstances politiques dans une direction qui garantira une plus grande stabilité. "

Cliquez ici pour écouter l'audio

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La suite des évènements 

Même si Kais Saied maintient que le dialogue continue, Johannes Kadura estime qu’il est difficile d'évaluer pour l'instant comment la crise va se poursuivre. 

"Ce qui compte maintenant, c'est la manière dont Ennahdha va mobiliser ses partisans. L’extrême serait que le pays sombre dans le chaos si les partisans d’Ennahdha s'y mettent aussi. Mais tout cela peut changer. L’autre question, bien sûr, est de savoir comment les forces de sécurité vont se comporter. La police n'a pas encore pris parti et l'armée garde également un profil bas," conclut Johannes Kadura.

"Nous allons vers une dictature"

L'ancien président tunisien, Moncef Marzouki, a qualifié, lui aussi, la décision du président Kais Saied de "coup d'Etat". "Nous avons fait un énorme pas en arrière. Nous nous dirigeons vers une dictature", a déclaré Marzouki sur Facebook. 

Nafissa Amadou Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welledw_afrique