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Mort du puissant général algérien Ahmed Gaïd Salah

Sandrine Blanchard | Avec agences
23 décembre 2019

Chef d'état-major de l'armée algérienne depuis 1994, Ahmed Gaïd Salah avait présidé la transition du départ de Bouteflika à l'élection de Tebboune.

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Algérie Ahmed Gaid Salah
Ahmed Gaid SalahImage : Getty Images/AFP/R. Kramdi

'L'armée reste la colonne vertébrale du pouvoir' (R. Ouaissa, politologue) - MP3-Stereo

Le général Ahmed Gaïd Salah est décédé ce matin en Algérie d’une "crise cardiaque", d’après la présentatrice de la télévision nationale.

Agé de 79 ans, il assurait encore il y a deux semaines l’intérim du pouvoir dans l’attente de la présidentielle du 12 décembre.

Ahmed Gaïd Salah détient le record de longévité au poste de chef d'état-major de l'armée algérienne auquel Abdelaziz Bouteflika l’avait nommé en 1994.

Pilier du régime depuis l'indépendance

Ahmed Gaïd Salah a été auparavant un pilier du régime en place et de la mainmise du FLN sur le pays depuis l’indépendance de 1962.

Sa biographie officielle fait état d’un engagement à 17 ans au sein de l’Armée de libération nationale pour prendre les armes contre les colons français. 

Il était l’un des derniers représentants des "anciens combattants" de la guerre d’indépendance à un poste à responsabilité.

C’est lui qui avait convaincu Abdelaziz Bouteflika en avril 2019 de céder aux manifestations populaires et de donner sa démission.

Algerien: Erneute Proteste in Algier
Manifestant à Alger, le 12 décembreImage : Getty Images/AFP

Figure impopulaire mais "de premier ordre"

Mais son refus de lâcher prise et son acharnement à vouloir maintenir le système en place l’avaient rendu impopulaire au sein du "Hirak" algérien, le mouvement de contestation populaire.

Interrogé par la DW, Idriss Jebari, professeur-adjoint au Bowdoin College aux Etats-Unis et spécialiste du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, estime que le décès d’Ahmed Gaïd Salah revêt une importance de "premier ordre", même s’il s’était retiré du premier plan de la scène politique algérienne. 
Le chercheur précise : "c'est-à-dire que les autres acteurs auraient ajusté leurs comportement selon leurs interprétations des préférences de Gaïd Salah afin d'éviter un retour de l'armée en politique".

Selon lui, il aurait donc eu un "rôle de support durant la période turbulente qui s’annonce", en attendant que le nouveau président élu, Abdelmajid Tebboune, assoie sa légitimité.

Algérie Abdelmadjid Tebboune
Abdelmadjid Tebboune, le nouveau président algérienImage : picture-alliance/AP/F. Guidoum

Une économie phagocytée

Sur le plan économique, Idriss Jebari ne s'attend à aucune amélioration sur le court terme. "Le pays a besoin d'urgence de réformer son économie coûteuse, trop dépendante des hydrocarbures", analyse-t-il, or "cette réforme a été mise en veilleuse depuis quelques années".

Seule une stabilisation politique permettra à l'économie algérienne de se reprendre.

Le décès du général Ahmed Gaïd Salah risque toutefois de provoquer "une compétition au sein de l'armée pour qu'un successeur emerge, ainsi qu'un renouveau des tensions entre l'armée et la classe politique (surtout que de nombreux anciens haut dignitaires sont encore en prison, comme le frère d'Abdelaziz Bouteflika, mis là-bas par l'armée)", prédit le chercheur, pour qui "les manifestants vont sûrement réagir à ce décès, soit en étant motivés pour renouveler leurs demandes de changement radical, soit en ayant peur d'un changement trop rapide au sein de l'armée qui pourrait à présent décider de suspendre son refus de violence auprès des manifestants".

Le président de la République fraîchement élu, Abdelmajid Tebboune, avait prêté serment en présence d’Ahmed Gaïd Salah, jeudi 19 décembre.

Le chef de l’Etat a décrété trois jours de deuil national et chargé le général Saïd Chengriha, commandant des Forces terrestres, d'assurer l'intérim.

=> Pour en savoir plus sur ce successeur du général Salah et la "chance" qui se présente à l'armée de "rectifier le cours politique" en entamant notamment des négociations avec le Hirak, cliquez sur la photo en haut de l'article et écoutez l'interview avec Rachid Ouaissa, politologue spécialiste de l'Afrique du Nord et professeur à l'université de Marbourg, en Allemagne.

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