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La politique migratoire UE-Corne de l’Afrique a échoué

28 novembre 2017

Un nouveau rapport conjoint critique le processus de Khartoum mis en place par l’Union Européenne. Il indique que cette initiative met davantage les migrants en danger au lieu de lutter contre le trafic d’êtres humains.

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Mittelmeer Flüchtlinge in einem Schlauchboot
Des migrants au large de l'ItalieImage : picture alliance/AA/Italian Army/Marina Militare

La politique migratoire conjointe UE-Corne de l'Afrique a besoin d’être réorganisée d’urgence. C’est ce qu’affirme un nouveau rapport publié par l'Initiative internationale pour les droits du réfugié (IRRI), l'Initiative stratégique pour les femmes dans la Corne de l'Afrique (SIHA) et le Centre de droit des droits de l'Homme à l’Institut des études orientales et africaines SOAS de l’Université de Londres.

La politique dont il est question, c’est l’initiative sur la route migratoire UE-Corne de l’Afrique, connue également sous le nom de Processus de Khartoum. Mise en place en 2014 par 37 Etats européens et africains, cette politique multilatérale avait pour objectif de réduire la migration de masse depuis la Corne de l’Afrique vers l’Europe, et de s’attaquer aux problèmes régionaux que constituent le trafic d’êtres humains et les passeurs. Les critiques affirment que cette politique a aggravé la situation dans la région et mis davantage les migrants en danger.

Libyen Flüchtlinge auf Booten nach Rettung
Image : picture-alliance/AP Photo/S. Palacios

Migrants rescapés au large de la Libye

Une Erythréenne qui a quitté son pays il y a deux ans et réside actuellement dans la capitale éthiopienne Addis Abeba prévoit de continuer sa route vers l’Europe. “Je sais que des réfugiés sont kidnappés, vendus et même tués. Ils ne donnent pas assez d’eau ni de nourriture aux migrants pendant des jours. Ils frappent et torturent les hommes. Ils violent les femmes. J’ai entendu tant d’atrocités de la part de ceux qui ont déjà fait la traversée, mais d’un autre côté, je n’ai pas d’autre choix que de prendre cette même route“, explique-t-elle.

Hala Al-Karib, directrice régionale de l’Initiative Stratégique pour les femmes dans la Corne de l’Afrique, SIHA, affirme : “les efforts de l’Europe en matière de migration sont trop axés sur le fait d’essayer d’empêcher les gens de se déplacer. Les dirigeants européens considèrent les mouvements transfrontaliers illégaux comme une question de mise en application des lois et non comme un symptôme des problèmes profondément enracinés de gouvernance et de pauvreté extrême. Et ils ne tiennent pas compte des raisons qui poussent les gens à partir, ni de l’absence cruelle de choix à laquelle ils sont confrontés.”

Le rapport regroupe des interviews empiriques de plus de 60 réfugiés érythréens. L’Érythrée est l’un des pays les plus pauvres au monde et l’un des pires en matière de droits de l’Homme. Chaque mois, cinq milles personnes quittent le pays dans l’espoir d’échapper à la répression politique, aux persécutions religieuses, aux condition de travail extrêmement difficiles, à la faim et à l’enrôlement militaire forcé.

Dr. Lutz Oette, co-auteur de ce nouveau rapport et directeur du Centre de droit des droits de l’Homme à l’Institut des études orientales et africaines SOAS, conteste cette politique et son modèle de partenariat, dans lequel l’UE fournit des financements, des services et d’autres bénéfices en échange de la gestion de la migration par les pays africains. “L’ensemble du processus doit être restructuré. Je pense qu’il faut revenir à la case départ dans l’élaboration des politiques, impliquer d’autres acteurs et sortir de cette logique instrumentale et centrée sur les Etats qu’on a suivie jusqu’à présent “, a-t-il déclaré à la DW.

Le rapport préconise de nouvelles politiques entre l’UE et ses partenaires africains, dans lesquelles les facteurs politiques qui causent la migration seront abordés, et dans lesquelles la sécurité de la traversée et le traitement équitable des migrants seront une responsabilité partagée. Le rapport soutient également de nouvelles politiques qui refléteraient les expériences des individus et des communautés concernées, et dans lesquelles les droits fondamentaux des réfugiés et des migrants seraient respectés.

Première publication : 7 Novembre 2017

Source: dw.com