En RDC, la paix comme impératif du nouveau gouvernement
27 août 2019La formation de cette équipe gouvernementale est intervenue après plusieurs mois de tractations entre les deux familles politiques : le Front commun pour le Congo (FCC) et Cap pour le changement (Cash). Les 26 provinces de la RDC sont représentés. Le FCC de l’ancien président Joseph Kabila obtient 42 postes contre 23 au Cach du nouveau chef de l'Etat Félix Thisekedi
"Ceux qui n'ont jamais été ministres représentent 76,97% de l'équipe", s’est félicité le Premier ministre, pour qui il s'agit de "la plus grande innovation".
Plusieurs portefeuilles régaliens sont conservés par des proches de l’ancien président Joseph Kabila : Aimé Ngoy Mukena obtient la Défense alors que Célestin Tunda Ya Kassende le secrétaire général adjoint du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) devient ministre de la justice.
Le ministère des Finances sera dirigé par José Sele Yalaghuli, ancien directeur de cabinet de l’ex-premier ministre Matata Ponyo.
De nombreuses attentes….
L’ancien gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, est lui nommé ministre de l’Industrie.
Cette nouvelle réjouit à Goma. Richard Muhindo, un enseignant, appelle la ministre à être plus dynamique encore qu'auparavant au sein de cette nouvelle équipe :
"La classe politique est en train d’être retravaillée. Il y avait seulement les mêmes personnes qui revenaient au gouvernement. Cette fois-ci, il y a des ajustements. Avec ce nouveau souffle, nous espérons qu’il y aura des changements. Le peuple attend des gens qui vont se pencher d’abord sur les aspects sécuritaires…C’est tout à fait normal que nous puissions attendre beaucoup de Julien Paluku, quoi qu’il se retrouve dans le secteur de l’industrie, c’est d’abord un ministre, qu’il continue toujours à appuyer sur l’accélérateur."
La société civile de la ville de Beni, dans l’est de la RDC, attend du nouveau gouvernement des actions pour ramener la paix dans cette partie du pays en proie à des violences et à l’insécurité depuis plusieurs années.
"Les revendications de la société civile, les revendications de la population seront directement soumises au ministre de la Défense qui est le répondant direct face à la population. S'il prend ceci comme ses priorités, je pense qu'on mettra fin à cette guerre inutile qui nous est imposée par les ADF, les djihadjistes", indique Angélus Kavutirwaki, figure de la société civile de Béni.
L’équipe de Sylvestre Ilunga est aussi attendue dans le domaine de la transparence du secteur des mines. Dans la région du Katanga, on réagit ainsi à la nomination de Kitobo Samsoni. L'ancien ministre provincial des Mines est désormais ministre des Mines au niveau national.
"Nous voudrions d’abord qu’il tienne à ce que ce code minier ne soit pas changé. Parce que ce code minier est à l’avantage des communautés. Deuxièmement, il doit être en consultation permanente avec les organisations qui travaillent dans ce domaine", affirme Jean-Luc Kayoko expert des mines au cadre de concertation de la société civile du Katanga.
D'autres appellent encore à la bonne gouvernance, comme nous le disait le secrétaire générale de la Conférence Episcopale Nationale du Congo, l'abbé Donatien Nshole qui invite lui, le nouveau gouvernement à promouvoir la bonne gouvernance.
"Nous attendons que le gouvernement fasse que les richesses de ce pays bénéficient aux Congolais, à tous les Congolais. Il ne revient pas à la Cenco de donner de programme à chaque ministre. On n’a pas cette expertise-là. Mais, nous on veut le résultat" estime-t-il.
L'abbé Donatien Nshole salue également la présence de "beaucoup de nouvelles figures" dans ce nouveau gouvernement, estimant qu'il est permis de "croire qu'on va dans une direction nouvelle".
Faible représentativité des femmes
Les femmes sont représentées à hauteur de 17% seulement avec notamment la nomination d'Élysée Munembwe au ministère du Plan et Marie Tumba Nzeza qui devient la nouvelle cheffe de la diplomatie congolaise. C'est bien peu, selon Georges Kapimaba de l'ACAJ, l'Association congolaise pour l'accès à la justice, qui rappelle que la loi impose un quota minimum de 30% de femmes dans les institutions publiques.
"Ça m’a un peu attristé parce qu’on attend mieux. Mais quelque part, c’est peut-être mieux qu’avant. Comme on dit, step by step. Mais on espère que les choses vont s’améliorer avec le temps" déclare à la DW, Léonie Kandolo, militante pro-démocratie en RDC.
Dossiers urgents
Deux membres du gouvernement sont particulièrement attendus. Le novueau ministre de la Santé, Eteni Longondo, issu l'UDPS qui doit gérer l’épidémie d’Ebola qui a fait près de 2.000 morts en un an dans l'Est du pays, où est attendu samedi prochain, le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres.
Le nouveau ministre de l'Enseignement primaire, Willy Bakonga, membre du PPRD de Joseph Kabila, devra mettre en œuvre la mesure de la gratuité de l'enseignement primaire dans les écoles publiques dès la rentrée du 2 septembre. Une mesure qui pourrait couter environ 2,6 milliards de dollars, soit près de la moitié de l'actuel budget de l'Etat.
Satisfaction
Les États-Unis ont salué ce nouveau gouvernement. "Nous sommes prêts à travailler avec le nouveau gouvernement pour faire avancer le partenariat privilégié Etats-Unis.-RDC pour promouvoir la paix et la prospérité", a tweeté l'ambassadeur américain à Kinshasa Mike Hammer.