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Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande

12 mars 2010

Sans surprise le nouveau massacre de Jos, au Nigéria, occupe l'essentiel de l'actualité africaine cette semaine dans les journaux allemands.

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A Dogo Nahwa, le 8 mars 2010Image : AP

D'un journal à l'autre les titres se ressemblent. "Spirale de la violence", titre le Tagesspiegel de Berlin. "Des centaines de morts au Nigéria", titrent à l'unisson la Tageszeitung et la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Plus de 500 morts dans un massacre au Nigéria, écrit la Süddeutsche Zeitung qui note que l'attaque perpétrée par des nomades musulmans contre trois villages chrétiens s'est déroulée près de Jos, une ville qui depuis des années est régulièrement le théâtre de sanglants affrontements entre chrétiens et musulmans. Mais souligne le journal, l'Etat du Plateau, dans lequel est située la ville de Jos, n'est pas le seul concerné par les violences. Dans presque tous les Etats de la fédération nigériane des groupes ethniques se battent les uns contre les autres. Les commanditaires sont souvent des politiciens locaux qui excitent les groupes ethniques ou confessionnels pour être élus ou confirmés à leur poste par leurs partisans. Le gouvernement accapare 80 % du produit intérieur brut. Occuper une fonction publique est donc le meilleur moyen de gagner de l'argent. Pour le Tagesspiegel, la crise de Jos est en train de se transformer en une crise permanente et est considérée maintenant comme un test pour le président par intérim Goodluck Jonathan. Ce dernier, note la Frankfurter Allgemeine Zeitung, a réagi aux critiques formulées contre les forces de l'ordre: il a limogé son conseiller à la sécurité. De fait souligne le journal, l'attaque contre les trois villages chrétiens soulève bien des questions. Comment se fait-il qu'elle ait totalement surpris l'armée? Comment a-t-il été possible que des hommes lourdement armés aient pu pénétrer jusque dans les localités de Zot, Dogo-Nahawa et Ratsat malgré un couvre-feu en vigueur depuis les violences de janvier dernier dans la région? Ce qui s'est passé dans ces trois villages, note de son côté la Tageszeitung, témoigne d'un degré d'organisation plutôt rare dans les guerres fratricides du Nigéria. Elle rappelle les expulsions forcées de population observées au Darfour et dans l'est du Congo. Le Nigéria, estime le journal, pourrait glisser dans une guerre de religion d'une nouvelle qualité. Après les pogromes de janvier, Al Qaida a proposé son aide aux musulmans du Nigéria.

28.09.2009 DW-TV GLOBAL 3000 NOLLYWOOD
Nollywood, tournage d'un film

Un autre journal allemand s'intéresse aussi au Nigéria. Mais c'est pour montrer une toute autre facette du géant ouest-africain,à savoir l'énorme succès de la production cinématographique du Nigéria. Le Handelsblatt relève qu'en l'espace de quelques années cette industrie du film s'est hissée, par le nombre de productions, à la deuxième place sur le marché mondial. Nollywood, comme on l'appelle, produit 1 200 films par an, deux fois plus qu'à Hollywoord, et juste un peu moins que dans le Bollywood indien. La plupart des scénarios, écrit le journal, tournent autour du chômage et de la difficile ascension sociale dans la grande ville. L'appétit du public pour ces films puisés dans le quotidien africain est immense. 60 millions de Nigérians ont un magnétoscope. A sa sortie un film se vend en moyenne à 50 000 exemplaires. Et Nollywood connait aussi une popularité grandissante en dehors du Nigeria, la chaine par satellite "African Magic", diffusant les films sur tout le continent. Faute de studios, note le journal, les films sont tournés dans des hôtels ou des maisons particulières. Les hommes, dans ces films, portent des vestes aux couleurs criardes, les femmes d'immenses boucles d'oreilles et des robes moulantes. Bref souligne le jourtnal, ce sont des films qui font rêver toute l'Afrique.

Frauen Ost Kongo Afrika
Camp de réfugiés à Goma, janvier 2010Image : Ute Schaeffer

Un autre gros morceau du continent africain revient cette semaine dans les colonnes de la presse allemande. C'est la République démocratique du Congo, plus précisément l'est du pays où les milices rwandaises des FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda) seraient très affaiblies. C'est ce qu'on peut lire en tout cas dans la Tageszeitung qui renvoie à l'optimisme de la MONUC. Selon la Mission de l'Onu au Congo 1 997 combattants FDLR ont été démobilisés en 2009. L'arrestation en Allemagne du président des FDLR, Ignace Murwanashyaka, y est certainement pour quelque chose, note le journal. Le problème est que, pour remplacer les combattants rwandais qui tournent casaque, la milice recrute de plus en plus de Congolais, dont beaucoup d'enfants. Cela dit, poursuit le journal, si la tendance à l'affaiblissement des FDLR se maintient, la MONUC aura fait un grand pas en avant vers le succès de la mission et son départ du Congo. Tout récemment encore le gouvernement congolais a exigé une nouvelle fois le retrait total de la MONUC d'ici à la mi-2011. Le gouvernement du président Kabila est soupçonné de vouloir se débarrasser des casques bleus avant que sa propre réelection ne soit à l'ordre du jour en juillet 2011. A la lumière du rétrécissement des espaces de liberté politique au Congo, cette élection est d'ores et déjà comparée par la communauté internationale à la réélection contestée d'Hamid Karzai l'an dernier en Afghanisatan. L'Union européenne, précise le journal, a d'ailleurs décidé de n'accorder aucun appui financier aux élections de 2011.

Togo Demonstration Wahlen
Manifestation à Lomé, 7 mars 2010Image : AP

Toujours à propos d'élections, la Tageszeitung publie un bref article sur la victoire proclamée de Faure Gnassingbé à la présidentielle du 4 mars au Togo, et sur les protestations de l'opposition. A noter aussi dans la Süddeutsche Zeitung un article sur la querelle récurrente entre partisans et adversaires de l'aide au développement. Les premiers plaident pour un accroissement de l'aide, les seconds dénoncent un tonneau sans fond qui paralyse les pays pauvres, surtout en Afrique. De fait, estime le journal, la promotion économique reste la forme d'aide la plus efficace. La construction d'une usine de sucre au Mozambique combat la pauvreté infiniment plus vite qu'un énième projet de forage de puits. Et qui veut encourager l'émergence d'une couche moyenne dans la population ferait mieux d'accorder des crédits à des entrepreneurs locaux plutôt que d'organiser un atelier de travail avec des fonctionnaires gouvernementaux.

Auteur: Marie-Ange Pioerron
Edition: Fréjus Quenum