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Le droit de vote et l'intégration des étrangers

8 octobre 2018

Les migrants et les réfugiés jouissent de certains droits garantis par la Convention sur les réfugiés. Devraient-ils avoir le droit de voter aux élections nationales et locales dans leur pays d'accueil ?

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Türkei | Abstimmung über das Referendum
Image : picture-alliance/dpa/M. Kappeler

Pour beaucoup, être migrant signifie être privé de ses droits. Le droit international garantit les droits des réfugiés et oblige les États à les protéger. Mais le droit de vote a beau être couvert par un certain nombre de lois, en réalité, de nombreux migrants et réfugiés ne sont pas en mesure d'exercer pleinement ce droit.

Au sein de l'UE, il existe différentes lois sur le droit de vote. Dans la plupart des cas, seuls les citoyens ont le droit de vote dans un pays dont ils sont ressortissants. Tous les citoyens de l'UE peuvent voter aux élections locales et aux élections du Parlement européen, quel que soit leur lieu de résidence dans l’espace européen.

Republik Moldau Bürgermeisterwahl in Chisinau
Souvent, les migrants perdent le droit de vote dans leur pays d’origineImage : DW/E. Covalenco

En quoi le droit de vote pourrait-il aider ?

Selon Reuven (Ruvi) Ziegler, professeur agrégé de droit international à l'Université de Redding au Royaume-Uni, permettre aux réfugiés de voter permettrait d'accomplir deux choses : aider les migrants et les réfugiés à s'intégrer dans les pays d'accueil tout en leur donnant de la dignité. Cette affirmation est étayée par une étude menée par l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale (IDEA) et par la Fondation Robert Bosch en Allemagne.

La principale conclusion de l'étude, publiée en mars 2018, était que les réfugiés étaient désireux de participer à la vie politique, mais que les possibilités formelles de le faire étaient limitées.

Égalité de traitement

L'octroi du droit de vote peut avoir "une importance symbolique énorme" parce qu'"il fait passer le message de l'égalité de traitement", déclare le professeur Kees Groenendijk, expert en droit des migrations à l'Université de Nijmegen, aux Pays-Bas.

Mais le droit de vote n'est qu'une forme de participation politique. "La liberté d'expression, la liberté de former des organisations, des partis politiques, le droit de grève, ce sont aussi des droits politiques ", dit Groenendijk. "[Ces droits] ont été accordés aux immigrants dans la plupart des pays européens."

En Allemagne, il n'est pas nécessaire d'avoir la nationalité allemande pour adhérer à un parti politique. Les migrants et les réfugiés peuvent participer aux conseils locaux des migrants et aux organisations non gouvernementales qui encouragent l'intégration politique et sociale et un certain niveau de participation dans la communauté locale, ce qui leur donne la possibilité de faire entendre leur voix au niveau politique.

Comprendre la démocratie

Berlin Gegendemo zu AFD Demonstration
En Allemagne, tout le monde est libre d'exprimer ses opinions politiques dans le cadre de la loi (Berlin, le 27 mai 2018)Image : DW/W. Glucroft

Selon Ruvi Ziegler, les personnes qui viennent de pays non démocratiques, ou qui n'ont jamais eu de droits politiques, ont besoin de temps pour s'adapter et découvrir le système de leur pays hôte. Les États devraient offrir des cours de citoyenneté abordables et faire en sorte que les immigrants comprennent la démocratie, dit-il.

Cependant, l'attribution de la citoyenneté en soi n'est pas toujours la solution. Selon M. Ziegler, pour les migrants, cela signifierait souvent renoncer à leur nationalité d'origine, ce qui entraîne un plus grand éloignement par rapport à leurs origines.

Lutter contre les stéréotypes

Certains réfugiés qui ont participé à l'étude IDEA/Robert Bosch ont déclaré que les politiciens régionaux et nationaux ne prenaient toujours pas leurs opinions au sérieux. L'étude a également révélé que dans de nombreux pays d'accueil, les réfugiés sont confrontés à des stéréotypes négatifs ainsi qu'à un statut juridique précaire, ce qui rend difficile leur participation à la vie politique, même lorsqu'elle est autorisée.

Accorder aux réfugiés des droits politiques complets contribuerait à renverser les stéréotypes selon lesquels les migrants et les demandeurs d'asile ne sont que des victimes qui ont besoin d'aide, affirme Ruvi Ziegler. Il s'agit souvent de "personnes qui fuient parce qu'elles ont exprimé leur désaccord ou parce qu'elles sont, d'une manière ou d'une autre, en conflit avec leur propre Etat. Ce ne sont donc pas des gens sans défense."

Avoir son mot à dire dans la prise de décision

De nombreux arguments s'opposent à ce que les non-ressortissants, y compris les demandeurs d'asile et les réfugiés, puissent voter dans les pays d'accueil, reconnaît le professeur Groenendijk. Mais d’après lui, la plupart sont basés sur la peur. Selon Ruvi Ziegler, l'une des préoccupations est qu'un "afflux" de réfugiés pourrait "déséquilibrer" le statu quo politique du pays d'accueil. Mais comme les résidents autochtones sont plus nombreux que les migrants et les résidents dans tous les États membres de l'UE, cela est peu probable, ajoute-t-il.

Erste Parlamentssitzung nach Wahlen in Italien
Les États membres de l'UE ont des règles différentes concernant les personnes autorisées à voterImage : picture-alliance/AP/A. Medichini

M. Ziegler estime que si un pays a accepté qu'une personne ait besoin de l'asile, cette personne devrait avoir son mot à dire sur la façon dont les services sont fournis aux réfugiés par les autorités. "Si un État est dans une position où les réfugiés risquent de fausser le système politique, il est également probable que le nombre de réfugiés aura des répercussions importantes sur la prestation des services... (Ceci) renvoie aux raisons pour lesquelles les réfugiés sont importants pour les décideurs politiques et pour l’Etat qui fournit ces services".


➤ Où les étrangers peuvent-ils voter aux élections locales ?

  • Au Danemark, en Suède et en Finlande, le vote aux élections locales est autorisé après trois ans de résidence permanente.
  • En Belgique, les ressortissants de pays tiers ont également le droit de voter à certaines élections locales s’ils sont enregistrés dans une municipalité belge.
  • En Slovaquie, vous avez besoin de la résidence permanente pour pouvoir voter aux élections locales.
  • L'Espagne autorise le vote pour les ressortissants étrangers dont les pays ont un accord de réciprocité, mais jusqu'à présent, en dehors de l'UE, cela n'inclut que la Norvège.
  • Au Luxembourg, les ressortissants étrangers ne peuvent voter aux élections locales que s'ils résident au Luxembourg depuis cinq ans et remplissent certaines conditions.
  • Aux Pays-Bas, si vous venez d'un pays tiers, vous devez avoir résidé officiellement aux Pays-Bas pendant cinq ans.
  • Au Royaume-Uni, seuls les ressortissants de l'UE et certains citoyens du Commonwealth peuvent voter aux élections locales.
  • En Irlande, les ressortissants étrangers hors UE peuvent voter aux élections locales, mais ils doivent s'inscrire sur les listes électorales avant une certaine date.

 

Cet article écrit par Emma Wallis et traduit par Audrey Parmentier a été publié pour la première fois en anglais sur le site InfoMigrants: http://www.infomigrants.net/en/post/12269/the-voting-rights-gap-for-refugees-and-migrants-in-the-eu