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Tchad : une attaque, un deuil et beaucoup de questions

Blaise Dariustone
25 mars 2020

Près de 100 soldats tchadiens ont perdu la vie dans une offensive djihadiste dans la région du Lac Tchad. Un deuil national a été décrété.

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Un soldat de l'armée tchadienne
Un soldat de l'armée tchadienneImage : Reuters/E. Braun

Au Tchad, le gouvernement a décrété ce mercredi trois jours de deuil national en hommage à la centaine de soldats tués lundi dernier (23.03) lors d’une attaque djihadiste dans la région du Lac Tchad.

Elle s'est produite à Boma, une île de la province du Lac. On compte également de nombreux  blessés et entrainée de lourdes pertes de matériels du côté de l’armée tchadienne.

Selon plusieurs sources au sein de l’état-major général des armées, les assaillants ont surpris les éléments de l’armée nationale tchadienne aux environs de quatre heures du matin. La riposte a entrainé des combats d’une rare violence.

Des renforts appelés en secours ont été également pris pour cibles par les assaillants qui étaient visiblement bien préparés.

Des djihadistes qui connaissent le terrain

A l’issue de presque sept heures de combats, on dénombrait 98 soldats tchadiens tués, 47 blessés, de nombreux véhicules blindés calcinés et du matériel militaire emporté par les assaillants.

Pour l’analyste-politique Narcisse Laldjim, une meilleure maitrise du terrain par les djihadistes serait à l’origine de ce qu’il considère comme une défaite de l’armée tchadienne :

"C’est la première fois dans l’histoire des attaques terroristes que l’armée nationale tchadienne subit une telle défaite ou même une déculottée. C’est une vaste étendue truffée d'îlots et de marécages et c’est un repère de djihadistes. Ceux-ci ont un avantage par rapport au terrain qu’ils maitrisent puisqu’ils sont venus à bord de hors-bords pour attaquer l’armée. Ce qu’on peut déduire aussi de cette attaque c’est qu’il y a certainement des complices au sein de l’armée. S’il n’y avait pas de complices, ils ne seraient pas venus porter l’estocade au sein même du dispositif de l’armée nationale. Je pense que le gouvernement doit ouvrir une enquête pour établir les responsabilités."

Face à ces menaces djihadistes, l’Union européenne a pourtant financé la construction d’un centre de  contrôle commun à Bol, chef-lieu de la province du Lac, pour permettre aux forces de l’ordre de contrôler les différents points d’accès à cette province. 

Manque de réactivité

Hasard du calendrier, Gilbert Le Bigot, formateur dans ce centre, expliquait avant l’attaque de Boma que ce nouvel outil permettrait à l’armée tchadienne de réagir plus vite :

"Ce centre opérationnel commun fonctionne 24 heures sur 24. Quatre personnes y travaillent en permanence. Ils sont capables de recevoir des appels radios de toutes les forces de sécurité. L’alerte est redistribuée automatiquement. Mais ce centre reçoit aussi les appels téléphoniques des citoyens de la province qui peuvent avoir des problèmes de sécurité. En téléphonant à ce centre, celui-ci renvoie l’alerte et fait intervenir les forces de sécurités qui sont les plus proches de l’événement. Au lieu d’attendre très longtemps des renforts comme d’habitude, dans les dix minutes, quinze minutes, les citoyens ont quelqu’un qui peut venir les sauver."

Cette conviction de Gilbert Le Bigot sonne désormais vaine avec cette attaque durant laquelle les renforts envoyés sur place ont aussi subi des pertes.

Le chef de l’Etat Idriss Deby Itno, qui s’est rendu sur le terrain 24 heures après cette attaque, a reconnu l’ampleur des dégâts et promis une riposte dans les jours à venir.