Le Cachemire rejette les législatives indiennes
17 mai 2019La plus grande élection législative du monde a commencé en Inde le 11 avril et la dernière phase du scrutin aura lieu dimanche. Et le rejet de la démocratie indienne prend des proportions inédites. Lors de ces législatives, la participation n'a atteint que 22 %.
Ashraf Wani n'a que 29 ans. Mais depuis trois ans, il ne peut plus travailler, il ne peut plus étudier.
Impossible pour lui d'oublier ce jour d'octobre 2016 où il a manifesté à Pulwama. Les forces de sécurité armées de fusils à mitraille ouvrent le feu, projetant des centaines de billes d'acier. Ashraf est blessé aux yeux.
L’ampleur des mécontentements
Comme 78 % des électeurs, Ashraf a boycotté le scrutin. Il est convaincu que les habitants du Cachemire sont des citoyens de seconde zone en Inde.
"D'habitude, quand il y a des manifestations, la police utilise les mêmes méthodes. Que ce soit à Mumbai, à Delhi ou dans tous les autres États du pays, elle utilise différents outils comme des canons à eau ou des grenades assourdissantes. Mais au Cachemire, les forces de sécurité tirent avec des fusils à mitraille et même à balles réelles contre les civils. En ce sens, on voit bien que le Cachemire est traité différemment des autres."
Ce rejet du système politique a commencé en 2016 lorsque l'armée abat Burhan Wani, un militant séparatiste très populaire sur les réseaux sociaux.
Dans les mois qui suivent, les militaires tirent sur les manifestants à coup de mitraille, tuant au moins 14 personnes et en blessant 3.000.
Divorce consommé
Le divorce s'est accentué après l'attentat contre un convoi paramilitaire à Pulwama, revendiqué par un groupe djihadiste pakistanais qui a fait 40 morts en février. Les Cachemiriens ont alors subi des représailles à travers le pays.
Aujourd'hui, même les partis politiques du Cachemire sont discrédités, comme l'explique Naeem Akhter, le numéro 2 du PDP.
"Quand nous avons fait campagne pour les législatives, on ne pouvait pas coller des affiches ni poser des drapeaux du parti. Sinon nos militants auraient été attaqués par les insurgés.
Désormais, l'élection suscite le dégoût. « Voter est considéré comme un pêché », confie un journaliste local hors micro.