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Colère en Turquie

Aude Gensbittel16 mai 2014

Suite à la catastrophe de la mine de Soma, qui a fait presque 300 morts après un incendie mardi, la population a manifesté à travers la Turquie contre les mauvaises conditions de travail.

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La photo qui indigne l'opinion publique en Turquie : Yusuf Yerkel s'en prenant à un manifestant à Soma
La photo qui indigne l'opinion publique en Turquie : Yusuf Yerkel s'en prenant à un manifestant à SomaImage : Reuters

Une même photo s'étale en première page de la plupart des grands quotidiens : celle d'un jeune homme en costume cravate en train de donner un coup de pied à un manifestant maintenu au sol par deux militaires. Cet homme tiré à quatre épingles, c'est Yusuf Yerkel, l'un des conseillers du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.

Pour die tageszeitung, cette photo pourrait bien devenir le symbole d'un gouvernement qui, face à des centaines de morts, n'est pas en deuil et s'en prend même aux personnes endeuillées. Le Premier ministre et ses proches ont les nerfs à vif. Après les manifestations du parc de Gezi sont venus le scandale de corruption et les enregistrements compromettants. Et maintenant : la pire catastrophe du travail jamais survenue en Turquie. Ce genre d'événements aurait depuis longtemps poussé à la démission tout autre chef de gouvernement, mais pas le Premier ministre turc.

Le Premier ministre a été sifflé lors de sa visite à Soma
Le Premier ministre a été sifflé lors de sa visite à SomaImage : Reuters

L'accident minier lui-même n'est pas dangereux pour la carrière d'Erdogan, analyse la Frankfurter Allgemeine Zeitung, mais sa réaction à la catastrophe pourrait le devenir. D'abord un de ses conseillers a frappé un manifestant, ensuite le Premier ministre en serait lui-même venu aux mains. Erdogan ne comprend plus depuis longtemps les souffrances du peuple. Et beaucoup de Turcs ne pourront pas lui pardonner son comportement.

L'accident de Soma symbolise la face cachée du boom économique de la décennie Erdogan, écrit de son côté la Süddeutsche Zeitung. Le revenu national a été multiplié par trois et le Premier ministre en est fier. Mais il ne faut pas oublier que les conditions de travail sont extrêmement difficiles dans de nombreux secteurs, la sécurité y est négligée et les salaires très bas. Ce ne sont pas les régulations qui manquent à ce sujet, mais les contrôles pour qu'elles soient appliquées.

Jeudi, une manifestation a eu lieu à Ankara pour protester contre le parti au pouvoir, l'AKP
Jeudi, une manifestation a eu lieu à Ankara pour protester contre le parti au pouvoir, l'AKPImage : Reuters

Qu'il s'agisse du secteur de la santé, de la durée du temps de travail, du respect des droits syndicaux ou de la construction d'infrastructures, la Turquie accuse des lacunes dignes d'un pays sous-développé, ajoute die Welt. Il est impossible de dire quand Erdogan s'en rendra compte lui-même. Mais pour cela, il faudrait d'abord qu'il comprenne qu'une société civile moderne a de la valeur en soi.