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Simone Ehivet Gbagbo en entretien sur la DW, partie 2

Julien Adayé
14 septembre 2022

Après l’annonce de la création de son parti politique, l’ancienne première dame Simone Ehivet Gbagbo s’explique sur la DW et confie ses ambitions pour elle et le parti Mouvement des générations capables. En seconde partie de cet entretien, elle revient sur le processus de réconciliation, ses contacts avec Charles Blé Goudé ou encore ses idées face au terrorisme sur certaines pays du territoire.

https://p.dw.com/p/4Gng4

Retrouvez ici la première partie de cet entretien : 

Le retour de Simone Ehivet Gbagbo

DW : Madame la présidente, on parle de plus en plus de réconciliation nationale. Est-ce qu’elle est effective cette réconciliation aujourd’hui ?

Simone Gbagbo : Non. Je peux vous dire qu’on voit que non. Ça ne veut pas dire que rien n’a été fait. Mais l’essentiel n’a pas encore été fait. Parce que quand vous dîtes réconciliation, ça veut dire qu’il y a eu des bagarres, ça veut dire qu’il y a eu des démêlés, des déchirements, etc. Il faut s’assoir. Il faut le traiter. Pourquoi il y a eu des bagarres. Qui a fait quoi dans les bagarres ? Il faut le traiter. Il faut que la vérité à ce niveau-là triomphe. Et puis, il faut que chacun accepte de se lever au-dessus des ressentiments pour aller à la véritable réconciliation. Cela aussi, c’est pas fait. Regardez même un petit peu au niveau de l’Etat. Depuis 2011, nous avons des personnes qui ont été arrêtées. Nous avons des militaires qui ont été arrêtés. Nous avons des personnes qui sont encore en exil, qui veulent rentrer. Mais qui ne peuvent pas. Je vous donne un autre exemple : pendant cette crise-là, vous avez des populations entières qui ont perdu leur plantation, qui ont perdu leur champ, qui ont perdu leur maison, qui ont perdu même leur emploi. Et aujourd’hui, ils sont confinés dans des villages ou même hors de leur pays parce qu’ils ne peuvent pas récupérer leurs biens. On ne peut pas régler le problème de la réconciliation tant qu'il ne se produira pas la restitution des biens qui ont été confisqués par ceux qui ont gagné. Voilà. C’est autant de problèmes qui ne sont pas réglés. Et tant que ces problèmes ne sont pas réglés, la réconciliation n’est pas effective.

DW : Madame la présidente, Charles Blé Goudé a été libéré, au même titre que monsieur le président Laurent Gbagbo. Il a reçu son passeport. Que pensez-vous de son retour probable et quels sont les liens que vous avez aujourd’hui avec lui ? Est-ce que vous échangez par rapport à la création de votre parti, par rapport aux projets, par rapport à l’avenir politique de la Côte d’Ivoire ?

Simone Gbagbo : Oui, j’ai de très bon contacts avec monsieur Blé Goudé. Nous avons de très bonnes relations. Quand nous avons organisé notre assemblée générale ici, il a fait venir une délégation qui a même pris la parole. Cela nous a énormément plu, cela nous a énormément réconforté. Je pense que Blé Goudé doit revenir dans son pays. Je pense qu’il y a beaucoup de choses qu’il peut apporter à la vie démocratique de ce pays. Et ce serait bon qu’il vienne. C’est une bonne chose qu’il ait pu obtenir son passeport pour revenir au pays. A l’époque, quand ça a été fait, j’ai dit merci au gouvernement, merci au chef de l’Etat qui, enfin, lui a donné ce passeport là. Mais maintenant, tout le monde attend ici qu'il revienne.

DW : Que pensez-vous de Soro Guillaume et avez-vous des contacts avec lui ?

Simone Gbagbo : J’ai beaucoup moins de contacts avec monsieur Soro Guillaume, beaucoup moins. Mais bon, c’est lui aussi, c’est un Ivoirien, c’est un citoyen. C’est un citoyen. Il a fait des choses que je n’ai pas apprécié, que je n’ai pas approuvé et il le sait. Je le lui ai dit. Il le sait. Mais aujourd’hui, je dis, il faut que nous nous réconcilions. Donc lui aussi, il doit faire partie de cette réconciliation. Donc lui aussi, il doit pouvoir revenir dans son pays pour que définitivement, la question se règle et que tous les enfants de ce pays repartent.

DW : Avant de terminer, madame Simone Ehivet Gbagbo, le terrorisme menace une partie de la Côte d’Ivoire, la partie nord. Si Simone Gbagbo était la présidente de la Côte d’Ivoire, qu’aurait-elle fait pour résoudre ce problème de terrorisme ?

Simone Gbagbo : Vous savez, le terrorisme dans nos pays africains, ce sont des questions qui sont des questions d’intérêts économiques quelquefois, d’intérêts politiques souvent, avant même de devenir des questions de sécurité. Souvent, ce sont même des questions qui relèvent de relations internationales avec d’autres Etats, avec l’ancien colonisateur, etc. Il faut s’asseoir et puis traiter. Il faut s’assoir et puis traiter. Il faut traiter avec tous ceux qui sont partie prenantes dans un tel problème.

DW : Quelle serait votre méthodologie, par exemple ?

Simone Gbgabo : Mais moi, je n’hésiterai pas à parler avec ceux qui font les coups, ceux qui viennent, qui attaquent. Il faut s’asseoir et parler avec eux. Mais il faut également parler avec les commanditaires de ceux qui attaquent. Il faut également parler avec eux. Et il faut prendre de véritables mesures de sécurisation de nos populations, de nos frontières, ça aussi ce sont des choses.

DW : N’est-il pas temps que les ténors, les anciens comme on les appelle, passent le relais à une nouvelle génération en Côte d’Ivoire ? Quand on sait que Simone Ehivet Ggbabo a 73 ans passés. Et Alassane Ouattara a 78 ans. Laurent Gbagbo 76 et Henri Konan Bédié, le plus ancien, 87 ans ?

Simone Gbagbo : Bon, moi je ne pose pas le problème en ces termes là. C’est vrai, les générations doivent passer. Et de nouvelles générations doivent prendre le relais, ça on le dit tout le temps. On le dit tout le temps. Mais finalement, en dernier ressort, ce sont les électeurs qui décident. Ce sont les électeurs qui décident. Regardez un petit peu celui qui vient d’être élu aux Etats-Unis. Il est jeune ? Regardez Angela Merkel, elle est restée combien d’années ? Combien de mandats etc. ? Cela n’a pas choqué les Occidentaux. C’est les électeurs, c’est la population électrice qui doit avoir le dernier mot, qui doit décider.

DW : Merci beaucoup, madame Simone Ehivet Gbagbo.

Simone Gbagbo : Merci, merci pour tout, merci pour tout ce temps que vous m’avez accordé.

DW : Merci, madame la présidente.