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L'Allemagne inquiète face à la présidentielle en France

Hugo Flotat-Talon
11 avril 2022

L'Allemagne s'inquiète de la qualification de l'extrême-droite au second-tour de la présidentielle française.

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Affiches de campagne d'Emmanuel Macron et de Marine Le Pen
Les programmes européens d'Emmanuel Macron et de Marine Le Pen sont radicalement opposésImage : Patrick Batard/abaca/picture alliance

Les réactions en Allemagne, pays voisin de la France, sont nombreuses ce lundi après le premier tour de l'élection présidentielle, dimanche 10 avril. A Berlin et dans tout le pays, beaucoup s'inquiètent de la qualification de Marine Le Pen, candidate d'extrême-droite, arrivée deuxième, avec 23,15% des voix, derrière le président sortant Emmanuel Macron, qui a, lui, recueilli 27,85% des suffrages.

Une "catastrophe" pour l'Europe

Une victoire de Marine Le Pen serait pour l’Europe "une catastrophe semblable à celle du Brexit", écrit ce lundi le journal Tagespiegel, résumant bien les réactions à ce premier tour de la présidentielle française en Allemagne. 

Marine Le Pen parle en effet de vouloir "remanier très largement la relation avec l’Allemagne", parce qu’elle part du constat "d’une profonde et irrémédiable divergence de vues doctrinale, opérationnelle et industrielle avec Berlin", explique, sur la DW, en citant le programme de la candidate, Paul Maurice, chercheur au comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa) à l'Institut français des relations internationales en France. 

"L'élection en France est plus importante pour l'Europe que l’élection allemande", a même déclaré le candidat de la CDU aux dernières élections allemandes, Armin Laschet, devenu très discret dans les médias. 

"A travers l’Allemagne, c’est une remise en cause, même s’il est plus doux, plus caché qu’en 2017, du projet européen dans son intégralité", décrypte encore Paul Maurice. 

Lire aussi → La politique africaine de la France vue d'Allemagne

La candidate d’extrême-droite ne parle en effet plus de sortie de l’Union pour la France mais elle y reste profondément opposée. "Et s'il elle ne parle plus de Frexit par exemple, la sortie de l'UE de la France, elle reste floue, on ne sait pas ce qu'elle pourrait faire une fois élue", s'inquiète aussi, au micro de la DW, Evelyne Gebhardt, eurodéputée allemande du parti social-démocrate (SPD) jusqu’en février dernier.

Une "haine" vis-à-vis de l'Allemagne

Lors sa campagne, Marine le Pen n'a pas changé sa position vis-à-vis de l'Allemagne. Le pays est toujours présenté comme une sorte de "directeur" de l’UE et sert d’outil pour raviver le nationalisme, d’où les inquiétudes démultipliées à Berlin. 

Marine Le Pen à la sortie de l'isoloir
Marine Le Pen à la sortie de l'isoloirImage : DENIS CHARLET/AFP

"L'Allemagne est présentée comme le symbole de l’asservissement de la France, de la perte de souveraineté, parce que l’Allemagne serait la direction de l’Union européenne", décrypte Paul Maurice. 

Lire aussi →Comparaison de l'extrême-droite en France et en Allemagne

Marine le Pen s’oppose aussi au partage du siège de la France au Conseil de sécurité de l’Onu avec l’Allemagne.

S’ajoute à cela la guerre en Ukraine et les positions ambiguës vis-à-vis de Vladimir Poutine de la candidate. "On sait très bien en Allemagne que Madame Le Pen et Monsieur Poutine s’entendaient, jusqu’à il y a peu, très bien", dit Evelyne Gebhardt. "On sait aussi qu'un certain nombre de financements de son parti viennent de banques russes. Donc cela s’ajoute à l’inquiétude sur l’avenir et la politique européenne." 

Des conséquences jusqu'au Sahel

A ces sujets s'ajoutent des préoccupations quant à la coopération des deux pays à l’international. Au Sahel par exemple. "La France ferait cavalier seul avec Marine Le Pen", explique le chercheur Paul Maurice. "C'est paradoxal, car on parle aujourd’hui d'unretrait possible des troupes allemandes deux missions présentes au Mali et au Sahel (UETM et Minusma). Mais sans ces missions, la France n’a plus les moyens d’agir." 

A l’international la candidate parle aussi de stopper tout repentance sur la guerre d’Algérie ou le génocide au Rwanda

Face cette situation, de nombreux élus ou des éditorialistes en Allemagne appellent  le président sortant Emmanuel Macron à faire campagne avec "plus d’énergie" que jusqu’à présent, pour éviter la victoire de l’extrême-droite. On lui reproche, parfois très clairement, son manque d'engagement dans la campagne, voire même sa politique qui aurait "lassée" les Français et les Françaises.

Le deuxième tour de la présidentielle doit se tenir le 24 avril prochain.