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La Ligue arabe doit-elle intervenir en Syrie ?

15 janvier 2012

L'émir du Qatar a jeté un pavé dans la mare en proposant d'envoyer des soldats arabes pour "arrêter l'effusion de sang" en Syrie. Mais Tunis juge toute intervention "suicidaire". L'organisation panarabe est divisée.

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Les Syriens sont encore descendus dans les rues vendredi, jour traditionnel des manifestationsImage : Reuters

La Ligue arabe est bien embêtée. Jusqu'ici, elle avait prôné la méthode douce en Syrie avec un plan de sortie de crise qui prévoyait le retrait de l'armée des centres de contestation, la libération de tous les détenus depuis mi-mars et l'ouverture d'un dialogue avec l'opposition. Le président Bachar al-Assad l'a en réalité purement ignoré. Fin décembre, l'organisation panarabe a décidé d'envoyer des observateurs pour évaluer les "crimes" commis par le gouvernement syrien. Force est de constater que cette nouvelle initiative a de nouveau échoué. Un des observateurs, l'Algérien Anouar Malek, a quitté la mission la semaine dernière, estimant qu'il n'était pas "en mesure d'empêcher des scènes d'horreur". Damas continue en effet de réprimer dans le sang le mouvement de contestation qui secoue le pays depuis 10 mois. Selon l'ONU, pas moins de 400 personnes ont été tuées depuis le début de la mission le 26 décembre 2011.

Syrien Präsident Baschar al Assad hält Rede in Damaskus
Le président Bachar al-Assad s'accroche coûte que coûte au pouvoirImage : picture-alliance/dpa

Envoyer des troupes arabes ?

C'est dans ce contexte tendu que le Qatar a proposé d'envoyer une force arabe en Syrie pour mettre fin aux affrontements entre l'armée et les opposants. L'émir qatari, le cheikh Hamad ben Khalifa al Thani, a fait ces révélations sur la chaîne de télévision CBS : il souhaite l'envoi de troupes "pour arrêter l'effusion de sang". Le Qatar s'était très tôt associé à la campagne de l'Otan en Libye. Désormais, il est le premier Etat arabe à proposer une intervention militaire en Syrie.

Les réactions ne se sont pas fait attendre. L'ex-chef de la Ligue arabe, l'Egyptien Amr Moussa, a appelé l'organisation panarabe à étudier sérieusement l'envoi de troupes en Syrie. « La situation est dangereuse, il faut y mettre fin », a-t-il déclaré. En revanche, la Tunisie a fait part de son opposition à un tel projet. Le président Moncef Marzouki estime qu'une intervention militaire conduirait à une guerre au Moyen-Orient : « Toute la région va exploser, l'idée est suicidaire. »

Syrien Beobachter der Arabischen Liga
Les fameux observateurs de la Ligue arabe en exerciceImage : picture-alliance/dpa

Perspectives

L'opposition syrienne elle-même a jusqu'ici refusé toute intervention militaire étrangère, notamment en raison du fragile équilibre de la région. Et puis, l'intervention en Libye a calmé les ardeurs. La guerre a été plus longue que prévu, pour un résultat médiocre : un pays au bord de la guerre civile, selon les dires du chef du Conseil national de transition, Moustapha Abdeljalil. « Les pays occidentaux n'interviendront pas », a réaffirmé ce week-end William Hague, le chef de la diplomatie britannique, qui a rappelé que, contrairement à Tripoli, Damas ne dépend pas de sa force aérienne pour réprimer la révolte : une zone d'exclusion aérienne serait donc inutile.

Reste à voir si la Ligue arabe décidera de se lancer dans une telle aventure. Prochaine rencontre prévue le 22 janvier. L'organisation panarabe ne peut en tout cas plus rester les bras croisés devant ce qui se passe en Syrie. Car pendant que Damas cherche à faire diversion - avec par exemple cette nouvelle "amnistie générale pour les crimes commis entre le 15 mars 2011 et le 15 janvier 2012" promulguée ce dimanche, la troisième annonce de ce type depuis le début de la révolte - la répression est toujours aussi féroce. Ce week-end encore, l'armée syrienne a lancé une offensive à Zabadani, ville proche de la frontière libanaise, où elle se heurte à la résistance des insurgés appuyés par les soldats déserteurs. La machine de guerre de l'Etat face aux opposants : le même scénario depuis 10 mois.

Auteur : Cécile Leclerc (avec AFP, Reuters, dpa)
Edition : Moulay Abdel Aziz