La nouvelle constitution restreint l’indépendance de la justice, des médias et de la Banque centrale hongroise. Un recul démocratique qui enfreint les Traités européens et face auquel Bruxelles réagit avec mollesse.
Le Premier ministre hongrois Viktor Orban a ignoré jusqu'à présent les timides mises en gardes de Bruxelles
Qu’est-ce qui fait l’originalité du projet européen ? Qu’est-ce qui constitue finalement le cœur de son identité ? L’économie ? Le charbon et l’acier : ce par quoi tout a débuté en 1951 avec la création de la CECA : la Communauté européenne du charbon et de l’acier, l’ancêtre de la Communauté économique européenne ? Il semble en effet que l’économie et la mise en place d’un marché commun soit le cœur de ce projet historique. Pourtant il n’en est rien. Car le charbon et l’acier des origines n’étaient autres que la matière première avec laquelle on fabriquait les canons et les armes et derrière cette mutualisation des moyens de faire la guerre c’était la réconciliation entre la France et l’Allemagne ainsi que la paix sur un continent saigné par deux guerres mondiales qui était tout à coup sanctuarisé.
Car les pères de l’Europe, les Français Robert Schuman et Jean Monnet, l’Allemand Konrad Adenauer, le Belge Robert Spaak savaient que l’Europe ne pourrait pas commencer par une union politique car celle-ci ne pourrait qu’échouer devant les rivalités nationales. En revanche, une union économique, au nom de l’intérêt commercial commun, était tout à fait envisageable. C’est cette union économique qui par la suite devait favoriser l’émergence d’une union politique. Il s’agissait, comme le disait Robert Schuman, de suivre une politique des petits pas, une politique « des avancées concrètes » qui finiraient par créer « une solidarité de fait. »
L'année dernière, les eurodéputés avaient déjà protesté lors du discours de Viktor Orban devant le Parlement européen à Strasbourg
Justice et médias sous contrôle
Ainsi, dès le début, le projet d’un continent réconcilié et avançant en commun sous la bannière de la démocratie était au cœur de la construction européenne. Or, aujourd’hui, le recul démocratique de la Hongrie avec une nouvelle constitution, entrée en vigueur au 1er janvier, qui restreint l’indépendance de la justice, des médias et celle de la Banque centrale est un recul majeur et un camouflet inquiétant pour le projet européen. En fait, le recul hongrois est une crise beaucoup plus grave que la crise de l’euro car elle menace les fondements même de l’Europe, à savoir la démocratie et la liberté. Si Bruxelles ne réagit pas à temps et avec trop peu de fermeté alors le projet européen mourra bien plus vite que sous les coups des agences de notations.
Le recul démocratique en Hongrois, cette montée du nationalisme magyar risque-t-il oui ou non de mettre en péril tout l’édifice démocratique de l’Union européenne ? C’est la question que nous avons posé à Pierre Barge, le président de l’Association européenne des droits de l’homme.
Les enterrements discounts sont une conséquence macabre ou hilarante - c'est selon - du marché intérieur européen
Cercueil discount
Nous partons maintenant en République tchèque, un pays voisin de la Hongrie, pour une illustration à la fois amusante et macabre de l’Europe. Où comment les croque-morts ne connaissent plus de frontières. « Cercueil discount » : c’est le nom d’une entreprise de pompes funèbres allemande qui propose des obsèques à prix imbattables. Sa recette ? Des cercueils importés de l’Est et une incinération dans un crématorium situé en République tchèque.
C’est un reportage d’Alexis Rosenzweig.
Auteur : Jean-Michel Bos