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Restitution de trésors culturels: le défi de la conservation

9 novembre 2021

La France retourne des artéfacts au Bénin. L'Allemagne aussi s'ouvre à cette démarche. Mais qu'en est-il des autres pays et de la conservation des objets ?

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Le musée des civilisations noires à Dakar au Sénégal
Le Sénégal doit prochainement récupérer la pleine propriété d'un sabre et de son fourreau attribués à El Hadj Omar TallImage : AFP/Getty Images/Seyllou

La restitution de 26 trésors royaux au Bénin ce mardi (09.11.2021) par la France, intervient quelques jours après l'incendie dans un musée en République démocratique du Congo. 25.000 pièces ont été entièrement consumées dans cet incendie qui s'est déclaré en pleine nuit le samedi 6 novembre. Cela relance l'éternelle question de la capacité des pays concernés à entretenir les musées et les objets d'art ancestraux. 

De l'eau au moulin des détracteurs de la restitution

L'incendie du musée de Gungu, dans l'ouest de la RDC apporte sans doute de l'eau au moulin des opposants à la restitution des oeuvres d'art par les ex-puissances coloniales.

Pour eux, les pays seraient dans l'incapacité de conserver des objets de si grande valeur.

>>> Notre magazine "arbre à palabres" sur le sujet Oeuvres d'art d'Afrique en France : conflit autour d'une "restitution"

"Il y a un problème : celui du manque d'infrastructures pour conserver ce matériel comme cela se doit. Je pense qu'il est simplement irresponsable de renvoyer les objets d'art sans se préoccuper de leur bon entreposage, leur sécurité, leur conservation, le contrôle de l'environnement climatique etc.", estime John Picton, historien de l'art d'origine britannique qui a travaillé aussi bien pour le British Museum, que pour la Commission nigériane qui s'occupe des musées.

Un argument auquel le Bénin et le Nigeria apportent déjà la contradiction. Le Nigeria fait ériger le Edo Museum of West African Art qui va accueillir les bronzes que l'Allemagne s'apprête à restituer. Et au Bénin, un nouveau musée est en chantier et sera la destination finale des trésors royaux restitués par la France : trônes sculptés en filigrane, portes richement décorées et statues impressionnantes.

La situation de la restitution en Europe

Après un long silence, les musées européens affichent une disposition à aborder le sujet de la restitution. Ainsi, l'Allemagne s'est déclarée au début de l'année, prête à rendre au Nigeria, des bronzes pillés au XIXe siècle au royaume de Benin City situé dans le nord de l'actuel Nigeria, par des soldats britanniques.

John Picton : "Il y a un manque d'infrastructures pour conserver ce matériel"

Les Pays-Bas annoncent également des restitutions tout comme la Belgique. Au Royaume-Uni en revanche le sujet paraît encore très sensible.

Bonaventure Ndikung, conservateur camerounais d'art contemporain qui s'apprête à diriger la Maison des Cultures du monde de Berlin dès 2023, encourage les restitutions d'oeuvres d'art. "La réconciliation commence avec des excuses. C'est ce qui se fait pour le moment et devra se poursuivre. Il faut donc à mon avis penser davantage à la restitution et au renvoi des objets à leurs origines. Cela se fait aussi actuellement. Mais ce sont de premières étapes qui sont appelées à continuer", affirme-t-il dans une interview à la DW.

D'après des résultats de recherche comme ceux publiés par l'historienne de l'art Bénédicte Savoy, ces objets africains dont 80 à 90% se trouveraient dans les musées ethnologiques européens, qui ont vu le jour au début du XXe siècle, ont été saisis lors d'invasions militaires.

D'autres objets ont été récupérés par les explorateurs qui les échangeaient contre des cadeaux ramenés d'Europe. Des scientifiques qui ont voyagé en Afrique dans les années 1930 ont aussi retiré des objets d'art. Les missionnaires catholiques et évangéliques sont aussi cités parmi les plus éminents collectionneurs.

Photo de Fréjus Quenum à côté d'une carte du monde
Fréjus Quenum Journaliste, présentateur et reporter au programme francophone de la Deutsche Welle@frejusquenum