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Deux Rwandais devant la justice allemande

6 mai 2011

Rarement les lecteurs des journaux allemands n'auront été autant informés que cette semaine sur les crimes présumés commis par la rébellion hutu rwandaise des FDLR dans l'est de la République démocratique du Congo.

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Arrivée d'Ignace Murwanashyaka au tribunalImage : picture-alliance/dpa

La raison en est l'ouverture, le mercredi 4 mai à Stuttgart, dans le sud de l'Allemagne, du procès des deux principaux dirigeants de ces Forces démocratiques pour la libération du Rwanda: le président, Ignace Murwanashyaka et le vice président Straton Musoni. Tous deux sont inculpés de crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis dans l'est de la RDC. "Fauteurs de guerre africains domiciliés en Allemagne", titre la Frankfurter Allgemeine Zeitung qui rappelle que les deux inculpés vivent depuis une vingtaine d'années en Allemagne, d'où ils auraient ordonné et coordonné, par téléphone, des massacres, des viols et autres crimes de guerre. Ce procès, note le journal, inaugure l'application du code sur les crimes violant le droit international, entré en vigueur en Allemagne en 2002. L'Allemagne n'a pas donné suite à la demande d'extradition du Rwanda, les inculpés ne pouvant avoir là-bas la garantie d'un procès équitable. Les assassins sont parmi nous, écrit le quotidien Die Welt, qui rappelle que les deux dirigeants des FDLR ont passé des années en Allemagne sans être inquiétés, alors que les Nations unies avaient décrété des sanctions contre eux.

Prozess gegen mutmaßliche Kriegsverbrecher
Straton MusoniImage : picture-alliance/dpa

Se peut-il, s'interroge de son côté la Frankfurter Rundschau, qu'un tel ordre soit venu d'Allemagne: dans la nuit du 10 mai 2009, des rebelles ont attaqué la ville de Busurungi, dans l'est du Congo. Ils incendient des maisons, assassinent des femmes et des enfants. Des enquêteurs de l'ONU évalueront plus tard le nombre de victimes entre 60 et 95 - sans compter les morts carbonisés dans leurs maisons et dont les cadavres n'ont jamais été retrouvés. L'attaque a été perpétrée par les FDLR. Et Busurungi, lit-on dans la Süddeutsche Zeitung, n'est qu'un exemple extrait des 200 pages de l'acte d'accusation. Des dizaines d'atrocités y sont relatées. Les FDLR ne sont certes pas, dans l'est du Congo, la seule milice réputée pour ce genre de crimes. Mais avec l'affaire Murwanashyaka, la justice intervient dans une guerre actuelle. Les criminels de guerre présumés traduits en justice à La Haye le sont pour des crimes datant de conflits révolus. Radovan Karadzic par exemple pour l'ex-Yougoslavie ou Charles Taylor pour le Libéria. Dans l'est du Congo la guerre continue et les FDLR martyrisent toujours des civils - même si, depuis l'arrestation de Murwanashyaka, plus d'un millier de miliciens, sur les 6 000 que comptaient les FDLR, auraient déserté.

Frauen Ost Kongo neu
Femmes dans l'est du Congo

A propos de l'ouverture même du procès, mercredi donc à Stuttgart, la Frankfurter Rundschau note qu'Ignace Murwanashyaka est arrivé au tribunal avec un rosaire autour du cou et un sac en jute à la main. L'homme de Mannheim, qui en tant que président des FDLR aurait commandé l'une des milices les plus brutales de l'est du Congo, a apporté de la lecture, écrit le journal. Pendant plus de quatre heures ses défenseurs tentent, en vain,de faire obstacle à l'unique point de l'ordre du jour prévu pour le premier jour du procès: la lecture de l'accusation, qui a finalement commencé vers 14heures.

Libyen Tripolis Beerdigung Gaddafis Sohn
Enterrement du fils Kadhafi. Photo prise lors d'une tournée organisée par le gouvernement.Image : AP

Des traitres dans l'entourage de Kadhafi?

L'Otan est étonnamment bien informée des endroits où se trouve le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, constate la Süddeutsche Zeitung après le bombardement de la résidence privée d'un de ses fils, dans laquelle se trouvait précisément Kadhafi. Le journal en conclut à la présence de traîtres dans son entourage le plus proche. Kadhafi et son épouse ont survécu, mais leur plus jeune fils et trois de leurs petits enfants seraient morts. L'OTAN, écrit le journal, fait la chasse à Kadhafi. Elle n'a pas confirmé la mort de son fils. Mais il est clair que l'alliance occidentale, mandatée par l'ONU pour protéger les civils, veut toucher Kadhafi et ses proches. Tous les fils Kadhafi, note plus loin le journal, font partie du régime et exercent partiellement des fonctions officielles. Mais même si Saïf al-Arab - celui qui serait mort donc - a joué un rôle militaire depuis le début de l'insurrection, c'était certainement le moins important de la fratrie.

Libyen Misrata Rebellen
Colonne de fumée à MisrataImage : AP

La question de la fourniture d'armes aux rebelles est posée dans un éditorial de die tageszeitung. Les occidentaux sont divisés sur la question. Le scepticisme du gouvernement allemand et d'autres gouvernements européens est compréhensible, écrit le journal. L'armement des rebelles comporte des risques. Ne faudrait-il pas craindre par exemple qu'une partie des armes n'atterrisse entre les mains d'extrêmistes anti-occidentaux? Les rebelles épargneront-ils des civils "ennemis"?Les questions sont justifiées mais la stricte application d'un embargo global sur les armes peut avoir dans la situation actuelle des conséquences fatales. Une guerre ne s'arrête pas quand on stoppe les livraisons d'armes. Car, lorsqu'elle éclate, il y a au moins un camp qui est armé jusqu'aux dents - dans le cas de la Libye, l'armée de Kadhafi. Il est aussi plus facile pour un gouvernement que pour des rebelles de contourner l'embargo en s'approvisionnant sur le marché noir ou avec l'aide de gouvernements amis. La neutralité de l'embargo devrait donc faire le jeu du dictateur et aggraver davantage la situation des rebelles. Et le journal de conclure que les Etats occidentaux doivent choisir le moindre mal: appliquer l'embargo de l'ONU sur les armes uniquement contre le gouvernement libyen, et pas contre les rebelles.

Ein junger Mann läuft vor der alten Moschee in Agadez entlang
La vieille mosquée d'AgadezImage : picture-alliance/ dpa

Les naufragés d'Agadez

Dans le sillage de la guerre en Libye l'hebdomadaire Der Spiegel publie un article sur les naufragés d'Agadez, dans le nord du Niger. 30 000 Africains fuyant la Libye sont arrivés au Niger jusqu'à début avril, note le journal. L'Organisation mondiale des migrations estime entre-temps leur nombre à 60 000. L'Union européenne, poursuit notre confrère, s'est violemment disputée pour tout juste 30 000 réfugiés arrivés à Malte et Lampedusa. Ce n'est qu'une infime partie de ceux qui fuient la guerre en Libye. Un nombre infiniment plus grand de personnes a pris la route du sud, vers l'une des régions les plus pauvres du monde.

Auteur: Marie-Ange Pioerron
Edition: Cécile Leclerc