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Débat sur l'utilisation de l'analyse d'ADN

Aude Gensbittel18 janvier 2005

Il aura fallu seulement 48h d’enquête pour retrouver le meurtrier d’un célèbre couturier allemand, Rudolph Moshammer, assassiné la semaine dernière à Munich. C’est l’interrogation d’une banque de données nationale d'ADN qui a permis l’identification du coupable. L’élucidation de cette affaire a relancé un débat en Allemagne sur l’extension de l’utilisation des empreintes génétiques ADN par la justice. Une question qui anime nombre de journaux allemands aujourd’hui.

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Pour le journal Münchner Merkur, il n’y a pas de doute possible : l’empreinte génétique est la nouvelle preuve infaillible du 21ème siècle. Ceux qui veulent y renoncer devront trouver de meilleures raisons que la vague crainte que l’Etat pourrait vouloir répertorier des données génétiques sur la population entière à des fins douteuses. Personne n’en a l’intention, pas même la police. Pour le quotidien, l’analyse d’ADN doit devenir un moyen aussi courant d’élucider les enquêtes que les photos et les empreintes digitales de malfaiteurs cataloguées par la police. Il n’y a pas là d’inconvénient pour les citoyens innocents. Seuls les criminels potentiels ont quelque chose à craindre.

La Frankfurter Rundschau rappelle que la cour constitutionnelle avait déjà statué sur le sujet et déclaré qu’une analyse d’ADN représentait une atteinte importante au droit du citoyen de disposer des informations le concernant. Il s’agit donc de ne l’utiliser que dans des cas d’importance majeure, quand le droit de la société à la sécurité prend le dessus sur cette atteinte à un droit personnel. Selon les juges de cour constitutionnelle, la décision est trop importante pour être laissée à un simple policier faisant sa ronde de nuit et qui pourrait agir sous le coup du stress. C’est pourquoi seul un juge peut ordonner le recours à une analyse d’ADN. Mais visiblement poursuit le journal, l’opposition et une partie du SPD jugent ces mesures superflues. Selon eux, plus on stocke de données génétiques, plus on a de chances de retrouver les malfaiteurs. Un raisonnement qui peut mener à toutes sortes de dérives, comme de prélever systématiquement un échantillon d’ADN sur les nouveau-nés, en vue d’éventuels crimes futurs. Non, décidément, conclut le quotidien, les empreintes génétiques représentent des informations beaucoup plus délicates que les empreintes digitales.

Enfin la Süddeutsche Zeitung cite la mise en garde du philosophe Jürgen Habermas : « L’habitude d’avoir à disposition toutes sortes de contrôle sur la vie par les technologies biologiques finira par influencer les lois. » Pour le journal, c’est une phrase que la police et les hommes politiques devraient toujours considérer quand ils parlent d’empreintes génétiques et de l’élargissement de la banque de données ADN de la police criminelle fédérale. Certes les anciennes loi sont trop vagues et il faut en créer de nouvelles, aussi bien la police que les citoyens en ont besoin. Mais il s’agit de le faire avec la plus grande prudence et une profonde réflexion, pas dans un enthousiasme précipité parce qu’on vient d’élucider le meurtre d’une personnalité.