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Au Tchad, l'opposition dénonce l'incohérence du pouvoir

Blaise Dariustone
11 juin 2019

Le Tchad a appelé l'ambassade des États-Unis à ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures du pays, alors que le régime du président Idriss Deby Itno accepte l'aide militaire de la France.

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Präsident Tschad - Idriss Déby Itno
Image : UImago/Xinhua/C. Yichen

Les faits remontent au 1er juin dernier lorsque les militants du mouvement Les Transformateurs ont été empêchés d’organiser une manifestation avant d’être dispersés par les forces de l'ordre qui ont fait usage de gaz lacrymogènes. 

Des diplomates allemands, néerlandais et américains présents sur les lieux de la manifestation avaient été aussi bousculés par la police.

Mécontent de ce traitement, l’ambassade des États-Unis a publié un communiqué le 7 juin pour rappeler le Tchad au respect du droit  de manifester et celui de créer des partis politiques et associations. 

En réponse, le ministère des Affaires étrangères a publié à son tour un communiqué pour critiquer le message des américains, qualifié d’ingérence dans les affaires intérieures du Tchad.

Jean Bernard Padaré, secrétaire général chargé des affaires juridiques du Mouvement patriotique du salut (MPS), le parti au pouvoir, estime que "ce communiqué de presse est un peu surprenant dans la mesure où il y a toujours eu des élections libres et transparentes au Tchad". 

"Je ne sais pas pour quelle raison l’on se réveille pour nous le demander. Maintenant, si les marches sont refusées, c’est parce que le gouvernement ne veut prendre aucun risque. Il peut y avoir des personnes de mauvaise foi qui peuvent s’infiltrer dans des cortèges pour causer des dégradations, nous en avons trop souffert. Aucune puissance n’a contraint le Tchad à adhérer aux principes démocratiques, nous sommes un Etat souverain", ajoute M. Padaré. 

Mais pour l’opposant Saleh Kebzabo, la réaction des Américains est tout à fait normale. 

"Il n’y a pas de souveraineté étriquée. Ou bien le Tchad a opté pour la démocratie et s’inscrit dans le concert des nations au niveau des Nations unies et des autres organisations de développement, ou bien il opte pour le socialisme scientifique ou le communisme qui exclut la démocratie. A ce moment-là, il va vivre en autarcie et ne sera plus avec les autres pays du monde. Mais si le Tchad collabore avec les autres pays, les autres organisations, demande qu’on finance les élections et son développement, il y a des normes minimales qu'il doit accepter. Que les Français, l’Union européenne et les Allemands qui financent le Tchad demandent en retour une stricte application des règles de la démocratie", soutient Saleh Kebzabo. 

 

Une position que soutien aussi Abakar Assileck Halata, exilé politique en France. Le Tchad, qui sollicite souvent l’appui militaire de la France pour faire face à des mouvements rebelles, est mal placé selon lui pour crier à l’ingérence des Etats-Unis.


"Depuis quand le Tchad est-il souverain ? Parce que jusqu’à là c’est l’extérieur qui a soutenu le régime d’Idriss Deby. Prenons l’exemple de l’intervention militaire au début de l’année 2019. Le Tchad avait demandé à la France de bombarder ses propres fils. Quand cela les arrange, ils font appel à l'aide extérieure et la condamnent quand on les rappelle à l’ordre. Pourquoi sont-ils dérangés quand on leur demande de laisser les gens aller manifester et d’accorder l’autorisation aux partis politiques qui le méritent ?", s'interroge Abakar Assileck Halata. 

L’Ambassade d’Allemagne et le bureau diplomatique des Pays Bas au Tchad sont aussi visés par les critiques du gouvernement tchadien, à cause de la présence de deux diplomates allemands et néerlandais à la réunion du parti ‘’ Les Transformateurs’’ le 1er juin dernier.