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Au Cameroun, une unité fissurée

Henri Fotso
18 janvier 2018

Les Etats-Unis condamnent le meurtre de deux soldats dans la région et appellent les autorités à la mesure face aux sécessionnistes. Cet appel survient au lendemain d’une rumeur annonçant une série d'attaques.

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Kamerun - Proteste
Image : Reuters/J. Kouam

"La crise anglophone a mis en exergue que nous n’avons pas élaboré comment nous voulons notre vivre-ensemble" (Anicet Ekane)

Cette rumeur avait annoncé une série d'attaques de séparatistes pour protester contre la détention au Nigeria de leurs leaders. Etudiants et élèves avaient alors déserté les campus et les salles de classe.

Le Cameroun a perdu environ vingt soldats dans les deux régions anglophones depuis 2017, suite aux attaques répétées des sécessionnistes.

La plus récente attaque meurtrière a eu lieu dimanche 14 janvier dernier dans le sud-ouest où un gendarme a été tué. Des civils dont le nombre reste indéterminé ont aussi perdu la vie depuis un an dans le nord-ouest et le sud-ouest.

Amnesty International et le Réseau des défenseurs des droits de l’homme d’Afrique centrale totalisaient déjà vingt-deux tués en fin d’année dernière.

Les pertes en vies humaines du côté des sécessionnistes restent cependant difficiles à établir tant il s’agit d’assaillants tombés pendant des opérations militaires. "A l’heure où je vous parle, la région me semble calme, en tout cas la ville de Bamenda", a déclaré Célestin Djamen, cadre politique du Social Democratic Front, revenu du nord-ouest où les violences avaient commencé. 

Pour lui, ce qui est embêtant, c’est que dans cette région comme dans le sud-ouest, il y a encore des élèves qui n’ont pas repris les cours: "Comme il n’y a pas un minimum de sécurité, les parents préfèrent ne pas envoyer leurs enfants à l’école".

Selon un rapport circonstanciel de la coordination administrative et du comité de coordination du maintien de l’ordre, seulement 60% d’élèves ont repris le chemin de l’école dans le Sud-Ouest anglophone à la rentrée scolaire 2017-2018.

Dans le sud-ouest, la panique s’était emparée des élèves, enseignants et parents lundi 15 janvier, suite à la fausse nouvelle divulguée par des sécessionnistes annonçant des attaques.

Les auteurs de cette folle rumeur, un proviseur et un censeur de la région, ont été identifiés et relevés de leurs fonctions. Ils tombent sous le coup de la loi anti-terroriste et risquent plusieurs années de prison.

Paul Biya dans son discours de Nouvel An, avait promis qu’il poursuivra sans faiblesse ceux qu’il nomme «des pyromanes terroristes» des régions anglophones: "j’ai à cet égard instruit que tous ceux qui ont pris les armes, qui exercent la violence ou qui incitent à la violence soient combattus sans relâche, et répondent de leurs crimes devant la justice. Les opérations de sécurisations engagées à cet égard ont donné d’excellents résultats. Elles vont se poursuivre sans faiblesse

Le plus lourd bilan matériel est enregistré par les établissements scolaires. Au moins quinze écoles ont été incendiées par les séparatistes en un an.

A cause aussi des journées villes mortes qui restent en vigueur dans les deux régions anglophones qui représentent jusqu’à 20% de la population générale du Cameroun,  l’économie enregistre des pertes importantes dans certains secteurs, notamment, le secteur pétrolier et celui des services.

Pour l’homme politique, Anicet Ekane, "l’occasion faisant le larron, la crise anglophone a mis en exergue que nous n’avons pas élaboré comment nous voulons notre vivre-ensemble".

Et il est confiant que, "la crise anglophone doit être l’occasion pour redéfinir ce vivre-ensemble, et régler pour de bon ce problème de mal vivre généralisé dans le pays, de développement non harmonieux dans nos régions, et de la décentralisation indispensable pour parfaire la démocratie dans notre pays".

La crise anglophone a engendré la fuite vers le Nigeria de plus ou moins 7000 personnes. La majorité se trouve dans des camps aménagés par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés, le HCR.