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Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande.

11 juin 2010

Le monde entier a les yeux tournés vers l'Afrique du sud. La presse allemande ne fait pas exception et consacre beaucoup d'articles à la Coupe du monde de football.

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Image : AP

Une fête pour l'Afrique - titre l'hebdomadaire Die Zeit. La magie du football nous fait découvrir un continent au-delà de la guerre, des maladies et de la corruption. Mais demande le journal, n'aurait-il pas mieux valu dépenser les milliards de la Coupe du monde dans la construction d'écoles et d'hôpitaux? Question purement rhétorique, car répond Die Zeit, bien sûr il y a des investissements plus judicieux que des stades hyper-modernes. Cela est vrai pour tous les Etats, riches ou pauvres. Reprocher aux Africains de gaspiller l'argent à des relents de vieille tutelle coloniale, comme si la joie du sport devait rester le privilège des nations riches. Or le football en Afrique, note plus loin le journal, est beaucoup plus qu'un jeu. Il agit comme un alliage qui depuis les indépendances maintient la cohésion de jeunes Etats fragiles et renforce leur identité nationale. Il vient à bout des barrières linguistiques, il jette des passerelles entre les cultures. Les Sud-Africains ne seront sans doute pas champions du monde, mais ils veulent montrer au monde que rien ne justifie l'afropessimisme. Un afropessimisme que le Tagesspiegel de Berlin bat aussi en brèche en consacrant un article à l'Afrique comme marché de l'avenir. Le continent se réveille, écrit le journal, selon une nouvelle étude publiée par un institut économique de Hambourg, l'espace économique africain est devenu, après l'Asie du sud-est, la deuxième région la plus dynamique du monde. Pour la seule Afrique du sud, la Frankfurter Allgemeine Zeitung relève que selon les prévisions des économistes, la Coupe du monde devrait valoir au pays un demi-point de croissance supplémentaire, le taux passant à 3,1%. C'est moins qu'espéré au début, mais en période de crise économique, le coup de pouce est le bienvenu.

ANC Anhänger in Pretoria
Image : picture-alliance/ dpa

Certains journaux allemands gardent quand même un regard critique sur l'Afrique du sud. La Tageszeitung de Berlin par exemple dresse un bilan peu glorieux des prestations de Jacob Zuma depuis son investiture comme président en avril 2009. Son gouvernement écrit le journal, va de débâcle en débâcle. Il est déchiré, son principal objectif est le prochain congrès de l'ANC, dans deux ans, car c'est là que les élections de 2014 seront mises sur les rails, et il n'est pas certain que la base acclamera encore Jacob Zuma comme elle l'a fait en 2007. Le journal évoque ensuite les nombreuses dérives de l'ANC, la lutte de pouvoir devient de plus en plus dure, elle est parfois mortelle. Le vice-ministre de la santé est mort en avril dans un mystérieux accident de voiture. C'est de la politique à la zimbabwéenne, souligne la TAZ. Toute critique est réprimée - c'est le triste bilan du rêve d'une Afrique du sud démocratique, cher à Nelson Mandela. Mandela qui, note de son coté le Tagesspiegel, se tait sur la corruption et l'arrogance de ses successeurs. A 91 ans, il a une santé de plus en plus fragile, il suivra la compétition dans sa maison de Johannesburg, et cette Coupe du monde sera peut-être pour l'Afrique du sud la dernière occasion de rendre hommage au père fondateur de l'Afrique du sud moderne.

Bildergalerie Ruanda Versöhnung Bild 3
Paul KagaméImage : James Nzibavuga

En dehors de l'Afrique du sud, le Rwanda inspire un long article au journal "der Freitag" qui livre cette conception de la démocratie défendue par Paul Kagamé: "la démocratie est une bonne musique, mais il faut avoir des oreilles pour l'entendre." Et le président rwandais développe ainsi son raisonnement :" imaginez une famille qui a passé toute la nuit à se demander ce qu'elle mangerait le lendemain. Croyez-vous qu'elle puisse penser à autre chose." Kagamé, poursuit le journal, est admiré en occident pour avoir conduit le Rwanda sur la voie de la paix intérieure et du succès économique après le génocide de 1994. Le pays est devenu le chouchou des donateurs. Le président ne peut pas comprendre que des observateurs extérieurs remettent en cause le contrôle qu'il exerce sur ce petit pays modèle en Afrique. Et le journal, qui présente Kagamé comme un autocrate, rappelle que deux journaux indépendants ont été fermés, deux généraux arrêtés et l'opposante Victoire Ingabiré placée en résidence surveillée depuis son retour d'exil des Pays-Bas.

Flash-Galerie Internationaler Strafgerichtshof in Den Haag ICC
La CPI à La HayeImage : Hanhil/by/sa

Un article encore dans la Tageszeitung sur la conférence de révision de la Cour Pénale internationale, qui vient d'avoir lieu à Kampala. La capitale de l'Ouganda, note le journal, n'est pas éloignée des théâtres de guerre civile que sont le nord de l'Ouganda, le Soudan et le Congo. La conférence de la CPI pourtant est à des lieues de la réalité du terrain. Si les victimes de crimes de guerre ne sont malgré tout pas oubliées, elles le doivent à des militantes comme l'avocate ougandaise Brigid Inder. Elle est venue à la conférence distribuer des tracts d'une initiative féminine de la ville de Gulu, dans le nord de l'Ouganda. Pendant plus de 20 ans les habitants de Gulu ont été martyrisés par les rebelles de l'Armée de résistance du seigneur. Et note le journal, ce qu'attendent surtout les femmes de la CPI c'est une meilleure protection des témoins. Comme l'explique Brigid Inder: quand une voiture de l'ONU s'arrête chez nous dans un village et emmène une femme, alors que tout le monde sait que notre cas est actuellement traité à La Haye, cette femme est déjà en danger. L'anonymat des témoins aux audiences de la cour ne les aide pas quand ils rentrent au village.

Auteur: Marie-Ange Pioerron
Edition: Fréjus Quenum