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Afropresse, l'Afrique à travers la presse allemande.

Marie-Ange Pioerron30 mai 2008

Les journaux, cette semaine, continuent de se pencher sur les violences xénophobes en Afrique du sud, la nation arc-en-ciel.

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Distribution de secours à des étrangers victimes de violences en Afrique du sudImage : AP

Un arc-en-ciel qui se brise, écrit l'hebdomadaire Die Zeit. C'est un modèle qui est en jeu, un rêve qui subitement vire à l'illusion. L'Afrique du sud est passée pendant longtemps pour un foyer de stabilité sur un continent instable, pour un modéle démocratique, pour l'incarnation de la réconciliation entre noirs et blancs, pour le laboratoire des sociétés multiethniques du 21ème siècle. Il semble à présent, poursuit Die Zeit, que l'Afrique du sud va emprunter elle aussi la "voie africaine", celle du déclin. Les excès de violences contre les immigrés africains, note un peu plus loin le journal, ne s'expliquent pas seulement par la pauvreté, sinon les habitants de tous les bidonvilles du monde se massacreraient mutuellement. Le mal témoigne aussi de l'anarchie et du non-droit dans les cités noires. La Tageszeitung relève que les autorités sud-africaines veulent créer des camps de déplacés pour offrir des abris aux dizaines de milliers d'étrangers qui ont dû fuir leurs foyers. Les organisations humanitaires, note le journal, ne voient pas ce projet d'un bon oeil, elles avertissent que le gouvernement sud-africain n'a aucune expérience avec ce genre de camps qui pourraient se transformer en camps de réfugiés permanents. Du fait de la situation politique dans leur pays, un retour des Zimbabwéens se révèle plus difficile que pour d'autres migrants, ceux qui sont venus par exemple du Mozambique ou du Malawi. Mais souligne le journal, les victimes des violences sont loin de vouloir toutes rentrer chez elles, même si elles ont peur de l'avenir en Afrique du sud. Die Welt relate que beaucoup de Sud-Africains, toutes couleurs de peau confondues, partagent le sentiment de honte exprimé par Mgr. Tutu. Aucune institution, aucun parti politique, aucune publication, écrit Die Welt, n'ont approuvé ces derniers événements sanglants. La vague de générosité est immense, des dons sont collectés comme après une catastrophe naturelle pour tenter d'effacer l'explosion de violence.

L'autre grand sujet, dans l'actualité africaine que traite la presse allemande cette semaine c'est évidemment l'arrestation, à Bruxelles, de l'ancien vice-président congolais, Jean-Pierre Bemba.

Les journaux rapportent que Bemba devrait être transféré prochainement à la Cour pénale internationale, qui a émis le mandat d'arrêt contre lui pour crimes de guerre présumés commis en 2002 et 2003 en République Centrafricaine. La Frankfurter Allgemeine Zeitung note que selon le procureur en chef de la CPI, Luis Moreno-Ocampo, les pillages, tortures et viols reprochés à Bemba et aux hommes de son Mouvement pour la Libération du Congo témoignent d'une "brutalité indescriptible". Mais comme le souligne le Tagesspiegel de Berlin, qui se rend coupable de graves atteintes aux droits de l'homme en Afrique doit s'attendre à devoir aussi en rendre compte plus tard. Après le dictateur libérien Charles Taylor, c'est maintenant au tour de Jean-Pierre Bemba d'être arrêté. Bemba, écrit le journal, passe pour un homme intelligent mais vil. Il possède assurément les moyens de se défendre. Du temps déjà du dictateur Mobutu il a accumulé une fortune estimée à quelques centaines de millions de dollars, entre autres par la distribution de faux billets. Son père comptait parmi les hommes d'affaires les plus puissants du pays. Mais le clan Bemba est sans doute dépassé maintenant par la famille Kabila . Après l'octroi de lucratives concessions minières sa fortune est chiffrée à plus d'un milliard de dollars. La Tageszeitung rappelle que depuis les élections de 2006 en RDC, beaucoup de militants du MLC, principalement des militaires, ont été tués au Congo ou sont morts en prison. De quoi comprendre, estime le journal, les garanties de sécurité demandées par Jean-Pierre Bemba pour rentrer au pays après plus d'un an d'exil au Portugal. Le MLC, plutôt perdu sans le charismatique Bemba, envisageait récemment de le nommer chef de l'opposition parlementaire. Cela aurait contribué à renforcer la très faible démocratie parlementaire à Kinshasa, poursuit le journal. Les militants du MLC spéculaient déjà sur une nouvelle marche triomphale de Bemba à travers Kinshasa, comme avant les élections. Il n'en sera rien, et beaucoup de Congolais doutent du sérieux des efforts internationaux de démocratisation au Congo. Protéger à grand frais Bemba comme candidat à la présidence et en faire le chef de l'opposition civile pour ensuite l'arrêter au moment où il est sur le point d'exercer cette fonction - cela ne sert personne au Congo, hormis le président Kabila dont le principal adversaire est maintenant écarté.

Enfin les relations entre le Japon et l'Afrique sont également évoquées cette semaine dans la presse allemande. Et cela à l'occasion de la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l'Afrique.

Le Japon double son aide à l'Afrique, titre la Süddeutsche Zeitung. Elle passera d'ici à 2012 à 1,3 milliard d'euros par an. Tokyo veut aussi promouvoir les investissements de firmes japonaises en Afrique. L'accroissement des salaires en Chine et en Asie du sud-est rend l'Afrique intéressante comme site de production. Sans compter que le Japon lorgne lui aussi sur les matières premières africaines, en particulier le pétrole et les métaux nécessaires au secteur électronique. Le Japon, poursuit le journal, va aussi faire don à l'Afrique de 20 000 tonnes de riz pour apaiser un peu la crise alimentaire. Les stocks de riz au Japon dépassent les 2,5 millions de tonnes, dont un million et demi importé des Etats-Unis. Depuis 1995 explique le journal, l'Organisation mondiale du commerce oblige le Japon à importer chaque année 770 000 tonnes de riz. Un riz que personne ne veut manger au Japon, et qui n'est pas mis sur le marché. Le don à l'Afrique , ajoute la Süddeutsche Zeitung, est donc pour le Japon l'occasion de se débarrasser d'une partie de ce riz mal aimé.