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HistoireAllemagne

Il y a 75 ans, les premières élections législatives de RFA

Sandrine Blanchard | Christoph Hasselbach
14 août 2024

Le 14 août 1949, les Allemands de l'Ouest étaient appelés pour la première fois à élire leurs députés au Bundestag, dans une République fédérale qui venait de voir le jour.

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Collage d'affiches électorales allemandes dans le cadre d'une exposition à la Haus der Geschichte (Maison de l'histoire à Bonn) (illustration)
En 70 ans, la démocratie allemande a évoluéImage : Christoph Hardt/Geisler-Fotopres/picture alliance

On l'oublie parfois mais la République fédérale d'Allemagne est un Etat jeune. En 1949, l'Allemagne est en ruines, à cause des années de dictature nazie et des quatre années de guerre.

Les dernières élections libres en date remontent à 17 ans plus tôt, ce sont celles qui ont permis l'accession au pouvoir d'Adolf Hitler qui s'est ensuite employé à détruire la démocratie.

Quelques mois après la création de la République fédérale d'Allemagne, le pays était à nouveau prêt et le 14 août 1949, les Allemands sont appelés à élire librement leurs députés au Parlement… mais seulement les Allemands de l'ouest.

Konrad Adenauer (CDU), la main levée pour saluer le public lors de sa nomination comme chancelier en septembre 1949
Konrad Adenauer, dont le parti CDU a remporté les élections législatives de 1949, deviendra en septembre le premier chancelier de RFAImage : dpa/picture alliance

Appels aux urnes

Il y a 75 ans jour pour jour, les Allemands de l'ouest se rendaient aux urnes pour élire la première assemblée du Bundestag de la jeune République fédérale.

Les têtes de file des deux principaux partis,  Kurt Schumacher du SPD et Konrad Adenauer de la CDU, appellent leurs concitoyens – et concitoyennes – à se déplacer massivement :

"Le 14 août, personne ne doit rester à la maison. Tout le monde doit se rendre aux urnes", déclarait ainsi Konrad Adenauer.

Kurt Schumacher (SPD) devant un micro à l'ouverture de la campagne électorale de 1949. Derrière lui, un public nombreux sur des gradins (photo d'archive en noir et blanc)
Kurt Schumacher (SPD) espérait que la RFA aurait la force de porter la réunification allemande. Celle-ci n'aura lieu qu'en 1990.Image : dpa/picture alliance

De son côté, Kurt Schumacher incitait aussi à aller voter car, disait-il : "La République fédérale de l'ouest de l'Allemagne doit faire bloc pour devenir la fondation de l'unité allemande et pour donner aux Allemands la possibilité de trouver toute une place équivalente aux autres dans le nouvel ordre européen."

Une portée historique

L'historien Benedikt Wintgens explique en quoi ce scrutin était effectivement doublement important. "Cela n'était pas seulement la première élection du Bundestag, mais le premier scrutin libre depuis l'automne 1932, une époque où la République de Weimar touchait à sa fin, minée par les crises", rappelle l'historien.

"Il n'y avait pas seulement 17 ans d'écart entre les deux élections, mais bien une rupture de civilisation, et il y avait eu la Deuxième guerre mondiale et tout ce qu'elle avait entraîné. C'était donc un nouveau départ pour la démocratie qui scellait l'arrivée de la RFA dans une forme d'Etat qui n'existait pas auparavant", poursuit-il au micro de la DW.

Tous les Allemands n'ont toutefois pas pu voter en ce 14 août 1949 : après la guerre, l'Allemagne a été divisée en deux Etats. A l'Ouest, les Alliés occidentaux soutenaient la RFA. Mais à l'Est, la RDA était sous l'influence de l'Union soviétique qui ne prévoyait pas de scrutins libres.

Histoire de l'unité allemande

Un grand choix de partis

31 millions de personnes sont donc appelées aux urnes le 14 août 1949. Et les électeurs ont le choix entre plusieurs partis qui tous devaient obtenir une licence de la part des puissances alliées (USA, Royaume Uni, France) pour avoir le droit de présenter des candidats.

La CDU/CSU représentait déjà le camp conservateur. Face à elle, le SPD se voulait plus proche des ouvriers. Le parti libéral du FDP, le parti communiste, le parti de Bavière (éligible seulement dans cette région), le parti catholique au centre et le Deutsche Partei national-conservateur rivalisaient pour gagner la confiance des électeurs de l'époque. Plusieurs de ces partis ont disparu depuis.

La campagne se déroule à couteaux tirés dans une société encore à vif après la guerre. La détresse de la population est grande, les réfugiés venus des territoires perdus en Europe de l'est affluent par millions en RFA. L'inflation étouffe les Allemands, le taux de chômage est très élevé.

L'histoire derrière le Mur de Berlin

Participation élevée

Aux informations diffusées dans les cinémas (Wochenschau), le speaker clame quelques jours après le scrutin : "L'Allemagne de l'ouest a élu son premier Bundestag. Du littoral au plus petit village des Alpes, tous, quelle que soit leur classe sociale, ont entendu l'appel à voter."

Effectivement, la participation est importante : 78,5% des inscrits sont allés voter. La CDU arrive en tête (31% des voix), suivie du SPD (29,2%). En tout, onze partis font leur entrée au Parlement.

Parmi les spécificités du système électoral allemand, est introduite une clause dite des "5%", toujours en vigueur en 2024. Elle prévoit que seuls les partis qui ont recueilli au moins 5% des suffrages exprimés ont la possibilité de siéger au Bundestag.

A l'époque, les députés se réunissent à Bonn, capitale provisoire de la RFA. (La ville rhénane gardera ce statut jusqu'à la réunification de 1990. C'est en 2000 que le Parlement est retourner siéger à Berlin).

Depuis, la jeune démocratie allemande a réussi à se renforcer, à l'est comme à l'ouest, en dépit des héritages lourds du nazisme et de la Guerre froide.