Susanna Osthoff : sauvetage silencieux
20 décembre 2005C'est sans bruit que le gouvernement allemand a réussi à sortir Susanne Osthoff des mains de ses ravisseurs – une gestion de crise des plus professionnelles que l´on ne peut que louer, surtout si l´on considère que le gouvernement allemand n´a pas cédé à un quelconque chantage politique, écrit le quotidien Die Welt. Ce qui est par contre moins sûr, c´est que Berlin n´a pas cédé à un quelconque chantage financier, poursuit-il. Aurait-on payé pour la libération d´une femme qui, en dépit de toutes les recommandations possibles et imaginables, s´est elle-même mise en danger ? Il ne faut pas oublier que Susanne Osthoff connaissait très bien l´Irak, qu´elle n´est en aucun cas comparable à un touriste landa. Mais le quotidien préfère recentrer le débat : la vraie question, c´est plutôt « a-t-on le droit de faire des reproches au gouvernement allemand pour ne pas avoir fait davantage appel à l´opinion publique ? », des critiques que l´on a pu lire dans la presse. Dans des situations similaires, les français et les italiens descendent dans les rues - les allemands, eux, attendent sagement que le gouvernement s´en occupe. Peut-on voir ça comme une tentative des allemands d´ignorer le terrorisme, s´interroge Die Welt. Quoi qu´il en soit, le gouvernement allemand a choisi la discrétion et a atteint ses objectifs, on ne peut rien lui reprocher, conclue le quotidien.
La Frankfurter Allgemeine Zeitung s´interroge justement sur les limites du chantage auquel peut être soumis un gouvernement. S´il se doit d´un côté de protéger ses ressortissants, il a de l´autre le devoir de faire passer la sécurité et l´intérêt général avant le destin d´un individu, sans oublier que, selon la cour constitutionnelle, tous les cas d´enlèvement ne sont pas à traiter suivant le même schéma. En ce qui concerne les enlèvements à l´étranger, conclue le journal, le bon fonctionnement de l´Etat et la sécurité de sa population n´ont encore jamais été menacés. Le sauvetage des otages a jusqu´à présent toujours été une priorité, et le versement de rançons ou l´attribution de moyens financiers pour des projets de développement ont toujours été un moyen pour les deux partis de ne pas perdre la face – et ça va le rester, conclue la quotidien. Ce qui est par contre impensable, poursuit-il, c´est que le gouvernement allemand ait pu céder aux exigences politiques des ravisseurs qui demandaient l´arrêt de toute coopération avec l'Irak.
Pour la Süddeutsche Zeitung, l´affaire relance justement le débat de l´intervention allemande en Irak. Berlin ferait bien de saisir l´opportunité pour revoir sa politique irakienne. La présence américaine en Irak nuit plus qu´autre chose, elle alimente les revendications des forces terroristes et nationalistes, l´instabilité traduite par les attentats et les enlèvements est devenue la règle générale, en dépit de toute élection. La semaine dernière, une majorité de courageux irakien a voté pour un nouveau parlement et un nouveau gouvernement : ce serait le bon moment pour mettre en place une politique irakienne internationale sous la commande des Nations Unies – une politique qui impliquerait l´Allemagne. Même le président américain Bush l´a reconnu : on ne pas laisser l´Irak livré à son sort, une aide extérieure est indispensable - ce devrait être l´aide des nations unies, conclue le journal.