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Peine maximale pour un révisionniste

Sandrine Blanchard16 février 2007

La justice allemande a condamné hier le révisionniste Ernst Zündel à une peine de cinq ans de prison ferme. Il s’agit de la peine la plus lourde possible. Ernst Zündel, un éditeur, avait publié, notamment sur Internet, des écrits mettant en cause l'existence des chambres à gaz.

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Ernst Zündel devant les juges
Ernst Zündel devant les jugesImage : AP

A commencer par la Frankfurter Rundschau, qui estime que la portée du verdict dépasse le cas particulier. Il montre en effet, puisqu’ Ernst Zündel avait publié sa propagande en ligne depuis le Canada, qu’Internet n’est pas un espace d’impunité. Le quotidien se réjouit que la peine maximale ait été prononcée, tout autre jugement n’aurait pas été à la hauteur de l’énergie criminelle de Zündel et son entourage. Petits bémols cependant : le journal déplore que l’instruction ait duré 15 mois, et que le procès ait été l’occasion pour la scène néonazie d’hier et d’aujourd’hui d’attirer l’attention.

Pour Die Welt, le verdict était évident pour tout le monde avant même que d’être prononcé. Le fait que l’une des avocates de la défense ait signé un écrit par « Heil Hitler » durant la procédure, n’est que l’un des dérapages de ce procès. Si Ernst Zündel n’avait pas écopé de la peine maximale, on aurait pu se demander ce qu’il fallait encore faire pour être condamné pour incitation à la haine raciale, en vertu du paragraphe 130 du droit pénal allemand. L’instruction a cependant le mérite d’être à l’origine d’une discussion sur la possibilité d’étendre, à l’échelle européenne, la disposition du droit pénal allemand qui punit « le racisme et la xénophobie ».

La Frankfurter Allgemeine Zeitung écrit : « Ernst Zündel est, il faut bien le dire, un homme célèbre dans le monde entier ». Pas seulement pour ses écrits mais aussi pour les procès qu’il a gagnés en dernière instance au Canada dans les années 1980. Sa technique, de recourir à des « preuves » pseudo-scientifiques pour nier l’existence des chambres à gaz, avait donné à l’époque une nouvelle vigueur au révisionnisme. Désormais, il est interdit en Allemagne de nier des faits reconnus comme tels. Il est inutile, quelque soient les preuves avancées, d’essayer de prouver leur inexistence, car l’examen même de ces preuves est répréhensible.

« Brun et dangereux » titre pour sa part la Süddeutsche Zeitung. Le quotidien munichois note que la liberté d’expression est un droit fondamental généreux, qui vaut quelque soit le contenu de la pensée exprimée, et donc aussi pour n’importe quelle convulsion cérébrale, l’idiotie ou l’imbécillité galopante. On pourrait donc penser qu’il serait juste, au nom de ce principe, de laisser aussi libre cours au bavardage de couleur brune, qui était la couleur des chemises des gardes paramilitaires sous le Troisième Reich. Ceci permettrait en effet de ne plus accorder de tribune à la stupidité des nazis, vieux ou jeunes, en les plaçant au centre de la réflexion des tribunaux, et les empêcherait de jouer les martyrs de la liberté d’expression. Le droit allemand réprouve cependant, pour des raisons historiques, tout appel à la haine, notamment antisémite. Cette précaution est-elle toujours nécessaire, 62 ans après la fin du régime nazi ? Il suffit, conclut le journal, d’observer les traces des violences xénophobes dans le pays pour répondre soi-même à cette question.