Le Traité de Lisbonne incompatible avec la Constitution allemande?
10 février 2009Ce n'est pas la première fois que la Cour Constitutionnelle allemande se prononce sur la légitimité d'un traité européen: en 1993, elle a déjà rendu un arrêt sur le Traité de Maastricht où elle indiquait les limites à ne pas franchir en matière d'ingérence de l'Union européenne dans les politiques nationales.
Cette fois, les députés plaignants (parmi lesquels Peter Gauweiler de la CSU, la branche bavaroise du parti chrétien-démocrate de la chancelière Angela Merkel, mais aussi des représentants du Parti de la Gauche radicale die Linke) reprochent au Traité de Lisbonne de priver le Parlement de ses compétences, et donc de violer la Loi fondamentale du pays.
D'après le professeur Dietrich Murswiek qui s'est exprimé au nom de Peter Gauweiler, le Traité ne fait qu'accroître le déficit démocratique notoire de l'Union. Du côté de l'extrême-gauche, Oskar Lafontaine redoute que la Loi fondamentale ne soit vidée de sa mission sociale. Les plaignants soulignent également que l'entrée en fonctions du Traité annulera le fait que le Bundestag et lui seul décide des missions de la Bundeswehr, l'armée allemande, à l'étranger. Pour Jo Leinen, président de la Commission parlementaire des Affaires constitutionnelles, le Traité de Lisbonne renforce au contraire les droits des citoyens:
«Je ne peux vraiment pas imaginer pourquoi le traité devrait être incompatible avec la loi fondamentale allemande. Mais une action en justice est imprévisible: une Haute Cour peut poser des conditions ou prononcer un jugement qui entraîne des blocages.»
Pour prouver sa volonté de défendre le traité - la chancelière avait mis un point d'honneur à le faire adopter -le gouvernement allemand a envoyé deux émissaires de poids à Karlsruhe, le ministre de l'Intérieur Wolfgang Schäuble et celui des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier.
Mais si la Cour constitutionnelle exige ne serait-ce que des mises au point, le processus de ratification sera une nouvelle fois bloqué. Or les Tchèques doivent se prononcer le 17 février sur son adoption mais leur président eurosceptique, Vaclav Klaus, a déjà fait savoir qu'il retarderait sa signature le plus longtemps possible. Quant à la Pologne, elle ne ratifiera le texte que si les Irlandais l'approuvent lors du second referendum. Le premier en juin 2008 s'était soldé par un échec.