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Afro-presse : Le Nigeria dans la tourmente

6 janvier 2012

Le Nigeria continue de faire couler de l'encre dans les journaux allemands. La secte islamiste Boko Haram multiplie les attaques contre des églises chrétiennes dans le nord, alors que le prix de l'essence augmente.

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Manifestation à Sokoto, janvier 2012Image : DW

Un terrorisme sans fin, écrit la Frankfurter Allgemeine Zeitung, qui souligne que la radicalisation dans le nord du Nigeria est directement liée à l'état du pays, à la corruption et à l'incapacité de l'Etat d'assurer à ses citoyens des conditions de vie adéquates. 50 ans après l'indépendance, le Nigeria reste un pays misérable, alors qu'il dispose de richesses immenses. Aux yeux des musulmans la faute en revient à un système étatique qui repose sur l'enrichissement personnel et le népotisme. Le gouvernement nigérian jette de l'huile sur le feu, titre die tageszeitung. C'est à croire que l'escalade du conflit avec les islamistes radicaux ne cause pas déjà suffisamment de problèmes au pays, il faut maintenant que le gouvernement provoque une vague de contestation sociale. Fin 2011, les subventions sur l'essence ont été supprimées - c'était la seule mesure en faveur des pauvres qui avait survécu à tous les troubles et dictatures. Car même les dictateurs militaires n'ont jamais osé supprimer cette subvention par crainte de la colère populaire.

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Bidonville au bord de la lagune de LagosImage : AP

La Berliner Zeitung préfère relater comment l'ambitieux gouverneur de Lagos veut transformer la mégapole nigériane en une ville africaine modèle. Le journal évoque par exemple le programme de lutte contre l'indiscipline grâce auquel le gouverneur, Babatunde Fashola, tente de maitriser le chaos dans la ville. C'est ainsi que des centaines de petits voyous ont été recyclés en gardiens de l'ordre ou collecteurs de taxes, d'autres ont été envoyés dans des fermes et des petites entreprises. La ville, note aussi le journal, est hérissée de chantiers. La firme allemande Julius Berger construit une autoroute urbaine à dix voies. Un plan de rénovation en chasse un autre. Avec les millions perçus par les nouveaux collecteurs d'impôts auprès des commerçants et des artisans, le gouverneur Fashola finance des infrastructures. Les bidonvilles ou les montagnes d'ordures sont remplacés par des espaces verts, les marchés chaotiques par des marchés couverts.

Mustafa al-Dabi Syrien Beobachtermission
Moustapha al-DabiImage : picture-alliance/dpa

Une curieuse mutation

C'est un général soudanais, Mohammed Moustapha al-Dabi, qui dirige la mission des observateurs de la Ligue arabe en Syrie. Il a dirigé autrefois les services de renseignements soudanais et cette étrange mutation inspire des réflexions à la presse. La carrière de ce général soudanais, lit-on dans l'hebdomadaire Die Zeit, appartient sans doute aux métamorphoses les plus surprenantes observées sur la scène internationale. Mais ajoute-t-il, cet art du changement est moins une caractéristique individuelle que l'expression et la conséquence de la stratégie de survie d'Etats répressifs à l'époque des interventions humanitaires. De tels régimes exploitent habilement la relation, souvent tactique, qu'entretiennent les pays occidentaux avec les droits de l'homme. Et ils profitent de l'inattention de l'opinion publique internationale. Le Soudan est un maître en la matière. Au Soudan aussi, souligne le journal, des dissidents ont tenté de proclamer le printemps arabe. Leurs protestations ont été étouffées dans l'oeuf par les services de sécurité. Khartoum a réagi tout autrement à l'insurrection en Libye. Le Soudan a livré des armes aux rebelles. Des dictateurs partenaires d'insurgés qui se soulèvent contre l'oppression, c'est le monde à l'envers! Mais c'est une realpolitik courante dans l'histoire des rébellions.

Youssou N'Dour - live Auftritt in Köln
Youssou N'Dour en concert à Cologne, juillet 2011Image : DW/C.Tefnescu

Un artiste engagé

Sans surprise, un artiste africain fait beaucoup parler de lui dans la presse allemande. C'est  Youssou N'Dour. Le chanteur sénégalais a annoncé sa candidature à l'élection présidentielle du 26 février dans son pays. Une popstar aux ambitions politiques, écrit la Süddeutsche Zeitung. Pour Youssou N'Dour, l'engagement politique a toujours fait partie de son travail. Il s'est engagé contre la faim dans le monde, pour amnesty international, pour le Darfour. Il est devenu le symbole international d'une politique à dimension morale. Cela pourrait être un avantage dans une campagne électorale contre le président Wade, 85 ans, accusé de corruption et népotisme. La Frankfurter Allgemeine Zeitung voit Youssou N'Dour sous les traits d'un patriote, et aussi d'un "selfmademan" qui ne doit son succès qu'à lui-même. Youssou N'Dour dit savoir ce que travailler veut dire. Cette ruade, ajoute le journal, est moins destinée au vieux Abdoulaye Wade qui, à un âge canonique, se porte une nouvelle fois candidat, qu'à ses enfants Karim et Sindjely qui prennent leurs aises dans la politique sénégalaise comme s'ils l'avaient reçue en héritage, et qui sont largement responsable de l'aspiration du Sénégal à en finir avec l'ère Wade. die tageszeitung qualife quant à elle Youssou N'Dour de porteur d'espoir pour l'Afrique.

ANC Anhänger in Pretoria
Partisans de l'ANC à Pretoria en 2009Image : picture-alliance/dpa

100 bougies pour l'ANC

L'ANC, le Congrès national africain a cent ans. La toute première organisation africaine de résistance aux colons européens a vu le jour le 8 janvier 1912 à Bloemfontein. Ce qu'elle est devenue un siècle plus tard est vu d'un oeil critique par la presse allemande. Notamment par l'hebdomadaire Die Zeit qui rappelle au passage que, le jour de sa création, l'ANC ne s'appellait pas encore Congrès national africain mais Congrès national des indigènes sud-africains. Il ne prendra le nom d'ANC que onze ans plus tard. Jamais dans son histoire, souligne le journal, l'ANC n'a été autant divisé qu'aujourd'hui. Il s'est fracturé en camps idéologiques qui se livrent une guerre sans merci: traditionalistes contre technocrates, vieux gauchistes contre modernisateurs néo-libéraux. Mais, poursuit Die Zeit, bien souvent ces cabales internes n'ont pas pour enjeu des questions de programme. La distribution de postes et de privilèges alimente bien plutôt la bataille livrée en coulisses. Car un poste politique est le moyen le plus rapide de s'enrichir dans la nouvelle Afrique du sud. La presse sud-africaine regorge d'articles sur la frénésie avec laquelle les grosses pointures de l'ANC pillent les caisses de l'Etat.

Auteur : Marie-Ange Pioerron
Edition : Fréjus Quenum