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L’ancien interprète de Kadhafi accuse Nicolas Sarkozy

4 avril 2018

Dans une interview accordée à la DW, Moftah Missouri, le tout dernier interprète de Mouammar Kadhafi, confirme que l’ex-dictateur libyen a bien financé la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007.

https://p.dw.com/p/2vPiB
Nicolas Sarkozy in Libyen mit Gaddafi
Image : AP

"En 2007, Kadhafi a versé une vingtaine de millions de dollars à Sarkozy" (Moftah Missouri, ancien interprète de Kadhafi)

Le 21 mars dernier, Nicolas Sarkozy a été mis en examen pour corruption passive, financement illégal de campagne électorale et recel de détournement de fonds publics. En clair, les juges soupçonnent l’ancien président français d’avoir financé illégalement sa campagne présidentielle de 2007 grâce à l’argent libyen, que lui aurait gratifié Mouammar Kadhafi. Peine encourue : dix ans de prison ferme selon la loi française, s’il est déclaré coupable.

Juste après sa mise en examen, Nicolas Sarkozy s’est vigoureusement défendu sur TF1, car pour lui, il s’agit d’un complot ourdi pour nuire à sa réputation.

Au micro de la DW, Moftah Missouri, le dernier interprète de Mouammar Kadhafi avant sa mort, confirme les informations fournies par le site en ligne Mediapart, selon lesquelles  l’ex-dictateur libyen a bel et bien financé la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007.

Moftah Missouri a été joint à Tunis, où il participe à une réunion préparatoire d’un congrès inter-libyen de paix.

Cliquez sur la photo ci-dessus pour écouter l'interview.

 

DW : Nicolas Sarkozy s’est donc présenté à la présidentielle de 2007; c’est à ce moment-là que l’argent a commencé à couler. C’est l'œuvre de Mouammar Kadhafi ?

Moftah Missouri : Il y avait des négociations, des discussions entre la partie française, c'est-à-dire les gens de la campagne électorale de Sarkozy, - Claude Guéant, Brice Hortefeux ainsi que Ziad Takieddine - qui étaient venus en Libye pour parler avec la partie libyenne concernée.

DW : Quand est-ce que les 50 millions de dollars ont été versés à Nicolas Sarkozy ?

MM : A la faveur de cette discussion entre les trois Français et les trois Libyens. Ça a donné lieu à un document, et ce document porte le chiffre de 50 millions. Quand le document est arrivé au bureau du Guide, ce dernier a donné son accord pour que l'on verse une vingtaine de millions de dollars.

DW : Mais ce que beaucoup ne comprennent pas, c’est que le Guide s’est tu sur cette affaire jusqu’au début de la campagne militaire de l’OTAN (NDLR, L'Organisation du traité de l'Atlantique Nord), et ce contre son régime.

MM : Le président  Sarkozy n’arrêtait pas de dire "moi, je suis votre ami pour toujours". Et donc, le Guide était vraiment sûr, si vous voulez, de cette amitié. Je ne sais pas pourquoi, le président Sarkozy a changé d’humeur, de parole, d’opinion, comme on change de cravate.

DW : Est-ce que ce n’est pas parce que Mouammar Kadhafi n’a pas respecté ses engagements, lors de sa visite à Paris ? 

MM : C’est très possible, parce qu’il y avait des discussions là-dessus. Et puis, comme vous le savez, Mouammar Kadhafi a traîné un peu.

DW : Onze ans après l’élection présidentielle en France, est-ce que vous pensez que les Libyens détiennent toujours des preuves du financement de la campagne de Nicolas Sarkozy ?

MM : Les preuves existent.

DW : Mais pourquoi est-ce que ces preuves ne sont pas versées dans le dossier à la justice  française ?

MM : Parce qu’on a nettoyé et retiré toutes les archives deux ou trois jours avant le bombardement de la caserne. Les archives pourraient se trouver chez quelqu’un.

DW : Salem Ghamoudi, l'ancien chef comptable du Guide ? 

MM : Salem Ghamoudi, oui.

DW : En tant qu’ancien interprète de Mouammar Kadhafi, vous pourriez venir témoigner à Paris devant la justice ?

MM : Si on me le demande, pourquoi pas ?

DW : Et la justice n’a jamais formulé une demande de ce genre ?

MM : Un juge instructeur m’a appelé une fois, et je lui ai confirmé ce que je viens de vous dire.

 

Photo de Eric Topona Mocnga
Eric Topona Journaliste au programme francophone de la Deutsche WelleETopona