L’Allemagne dans le collimateur des agences
6 décembre 2011Les dirigeants européens ressemblent de plus en plus à Sisyphe roulant sans cesse le même rocher en haut de la même colline. Car il y a sans conteste quelque chose de déprimant à occuper aujourd'hui le poste d’un chef d'État européen engagé dans la lutte contre la crise de l'euro. Réunis à Paris lundi, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont fait le grand jeu de l'entente franco-allemande en montrant qu'il n'y avait pas l'épaisseur d'un billet de cent euros entre leurs deux stratégies pour sortir de la crise.
Paris et Berlin ont donc annoncé le projet d'une union budgétaire qui reposerait sur deux piliers : la règle d'or qui vise à l'équilibre budgétaire dans chaque pays et le principe de sanctions automatiques en cas de non respect de cette règle. Ce projet sera présenté lors du Conseil des chefs d'États et de gouvernements jeudi à Bruxelles.
Camouflet pour Berlin
En apparence donc tout va bien, les États européens acceptant le chemin de la rigueur. Mais cela ne semble pas suffisant, puisque l'agence américaine de notation Standard & Poor's a menacé de dégrader d'ici trois mois les notes souveraines des pays de la zone euro, y compris l'Allemagne, ce qui est un camouflet pour Berlin qui apparaissait jusqu'alors comme le bon élève en Europe.
Le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker a accueilli cette nouvelle avec incompréhension : « Nous sommes sur la voie de la sortie de crise, nous consolidons, nous réformons... nous réformons également notre manière de gouverner. C'est pourquoi j'estime que la réaction de Sandard & Poor's est totalement exagérée. Cela m'étonne beaucoup que cette nouvelle tombe du ciel juste avant le sommet européen. Il ne peut pas s'agir d'un hasard. »
En vieux routier de la politique, Jean-Claude Juncker sait bien que cette menace de Standard & Poor's est une pression sur les Européens. Car les marchés sont agacés par l'Allemagne, qui refuse l'idée de mutualiser la dette avec le principe des eurobonds.
L'agence américaine de notation vient donc de signifier que l'Allemagne aussi n'est pas à l'abri. A moins que des solutions énergiques soient enfin prises qui ont trait à la solidarité entre les États cette fois : comme les eurobonds ou l'intervention de la Banque centrale européenne pour racheter les emprunts d'État.
Auteur : Jean-Michel Bos
Edition : Fréjus Quenum