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L'adieu à Mandela

Valérie Hirsch et Sandrine Blanchard5 décembre 2013

Nelson Mandela s'est éteint jeudi 5 décembre en Afrique du Sud, à l'âge de 95 ans. Avec lui disparaît un modèle de la lutte contre l’Apartheid et pour l’égalité entre les Hommes. Retour sur sa vie.

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Nelson MandelaImage : Getty Images

Toute la semaine prochaine a été déclarée « semaine nationale de deuil ». Nelson Mandela sera enterré dimanche 15 décembre dans son village de Qunu. Auparavant, une cérémonie nationale est prévue le 10 au stade de Soweto, en présence de nombreux chefs d'États.

Un militant acharné

Retour sur la vie Mandela: Né en 1918, Nelson Mandela, un fils de chef, entame des études de droit mais il est très vite absorbé par la lutte contre l’oppression que subissent les Noirs dans son pays.

22 000 victimes de l'Apartheid entre 1963 et 1990 ont été identifiées par la Commission vérité et réconciliation
22 000 victimes de l'Apartheid entre 1963 et 1990 ont été identifiées par la Commission vérité et réconciliationImage : Gille de Vlieg

A 26 ans, il fonde la Ligue des Jeunes de l’ANC et combat le régime d’Apartheid qui prend le pouvoir en 1949 et qui prône la séparation entre les Hommes selon leur couleur de peau. Alors que la répression augmente, Mandela créée en 1960 la branche armée de l’ANC. Deux ans plus tard, il est arrêté. Alors qu’il risque la peine de mort, il assure lui-même sa défense :

« J’ai lutté contre la domination des Blancs. J’ai lutté contre la domination des Noirs. Mon idéal le plus cher est celui d’une société libre et démocratique dans laquelle tous vivraient en harmonie et avec des chances égales. Si cela est nécessaire, c’est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir. »

27 ans derrière les barreaux

Mandela est condamné à la prison à vie et devient le prisonnier le plus célèbre au monde. Il passe dix-huit dans le bagne de Robben Island, au large du Cap, où la poussière dégagée par les cailloux que le prisonnier passait ses journées à casser a durablement endommagé ses poumons.

En Allemagne, la solidarité avec Mandela et sa cause est vivace dans les années 1980
En Allemagne, la solidarité avec Mandela et sa cause est vivace dans les années 1980Image : Solidaritätsdienst-international e.V.

Le 11 février 1990, il est finalement libéré, après 27 ans de captivité. Il y a quelques années, il se souvenait de ce jour en ces termes : « Un monde nouveau s’offrait à moi, qui m’était fermé pendant que j’étais en prison. »

Le premier président noir d’Afrique du sud

Devenu le premier président noir d’Afrique du sud, en 1994, Mandela tend la main aux Blancs. Il multiplie les gestes de réconciliation et parvient à faire l’unanimité dans un pays traumatisé par la violence et le racisme.

« Nous disons, oublions le passé, soucions-nous du présent et du futur. Mais nous disons aussi, ne laissons jamais les erreurs du passé se répéter. »

De l’homme au mythe

Madiba, c’est son surnom, est adulé par les foules qui apprécient sa sagesse, son humour, sa modestie. Il devient l’homme politique le plus populaire au monde mais prend soin d’éviter tout culte de la personnalité.

« Je n’aime pas cette impression qu’on me considère comme un demi-dieu. Je veux qu’on me voie comme un homme ordinaire, avec ses vertus et ses vices. »

Kathrada Ahmed, ancien compagnon de prison de Mandela, ne s’étonne pas que celui-ci soit devenu un mythe vivant de la réconciliation dans son pays :

Fresque réalisée à l'occasion du 94ème anniversaire de Madiba
Fresque réalisée à l'occasion du 94ème anniversaire de MadibaImage : picture-alliance/dpa

« Il est devenu un symbole, un symbole de la nouvelle Afrique du sud, un symbole de pardon, de réconciliation : pas de revanche, pas de haine, l’unité, une nation. Par exemple, quand il est devenu président du pays, la première chose qu’il a faite est d’inviter les femmes et veuves des anciens présidents et ministres de l’Apartheid à venir boire un thé. Comme la veuve de Vervoerd, qui était l’architecte de l’Apartheid, n’a pas pu venir, il a pris son avion et a été lui rendre visite ! Cela vient de son cœur, du plus profond de lui. Il ne joue pas, tout ce qu’il fait exprime un sentiment authentique. »

Le grand homme a aussi ses blessures secrètes. Il a souffert de ne pas avoir pu élever ses enfants et en 1996, il divorce de son épouse des années de lutte, Winnie, pour se remarier avec la Mozambicaine Graça Machel.

En 1999, Mandela montre encore l’exemple en abandonnant le pouvoir à la fin de son premier mandat. Il continue alors d’utiliser sa notoriété pour soutenir des projets sociaux et lutter contre le Sida.

Mandela, un porteur d'espoir
Mandela, un porteur d'espoirImage : Ullstein/Reuters

Depuis 2005, affaibli par son grand âge, ses apparitions publiques étaient devenues de plus en plus rares, jusqu’à sa dernière prestation lors de la Coupe du Monde de football en 2010, à Johannesburg.

Nelson Mandela avait été hospitalisé plusieurs fois depuis le début de l’année à Pretoria pour des problèmes pulmonaires.

Un combat encore vivant

De nombreuses œuvres d’art ont été consacrées à Nelson Mandela, par des artistes du monde entier. Madiba était un monument. Si le reste du monde n’est pas prêt de l’oublier non plus, les Africains, toutes générations confondues, ont gravé son nom dans leur mémoire.

Le rappeur sénégalais Didier Awadi confiait il y a peu à la DW l’importance de Mandela dans son parcours artistique et sa vie d’Homme :

« Pour moi, il représente l’espoir. L’espoir que rien n’est impossible, qu’aucune montagne n’est infranchissable, qu’aucun obstacle n’est insurmontable. Il symbolise aussi le pardon, le dépassement, le combat de l’Afrique en général et des opprimés partout dans le monde. Ce n’est pas une perte, parce que son combat est là est vivant. Il a gagné beaucoup de ses combats. Chaque âme doit mourir un jour. Ce qui est grave, c’est de vivre inutilement. La perte serait de ne pas s’inspirer de ses œuvres. Son travail, c’est à nous de nous en inspirer tous les jours. La perte serait de ne pas continuer son œuvre. Il est partout, il est le visage de l’Afrique du sud et de l’Afrique. Si on en est là, c’est grâce à lui. »

Nelson Mandela a vu l’inauguration du Mandela Bridge et connu, de son vivant, les pèlerinages de nombreux admirateurs à sa maison de Soweto.