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La deuxième « affaire BND »

Christophe LASCOMBES16 mai 2006

Récemment, la presse a révélé que le BND, les services secrets allemands censés opérer uniquement à l’étranger, a surveillé des journalistes pendant plusieurs années pour tenter d’élucider des fuites dans ses propres rangs. Hier, Berlin a réagi par une interdiction énergique et immédiate au BND d’espionner des journalistes ou de les rémunérer en échange d’informations. L’affaire fait ce matin les grands titres de la presse allemande.

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Censés opérer uniquement à l'étranger, les "James Bond" allemands n'ont plus le droit d'espionner les journalistes.
Censés opérer uniquement à l'étranger, les "James Bond" allemands n'ont plus le droit d'espionner les journalistes.Image : AP

Avec cet espionnage des journalistes, la Tageszeitung de Berlin se voit ramenée au bon vieux temps de la Stasi est-allemande, de sinistre mémoire. Il est désormais prouvé que ces activités d’espionnage n’ont en rien confirmé les soupçons qui les avaient motivées. Ici, le BND a outrepassé ses compétences en permanence et de manière éclatante. Depuis les écoutes téléphoniques effectuées dans le cadre de la lutte anti-terroriste, il est certes clair que les services secrets agissent aussi sur le territoire national. Mais dans ce dossier, les activités de police se mêlent de façon dangereuse aux activités de renseignements.

La Frankfurter Rundschau relève la contradiction à laquelle sont confrontés les services secrets lorsqu’ils doivent restreindre les libertés individuelles de certains pour protéger celles des autres. La réaction du gouvernement d’interdire désormais aux services secrets de fouler aux pieds la liberté de la presse dans leur chasse aux fuites renferme au bout du compte un aveu fatal : ces méthodes étaient bien tolérées.

Aux protestations d’atteinte à la liberté de la presse, la Frankfurter Allgemeine Zeitung rétorque : la liberté de la presse n’est pas un droit illimité. Ce droit fondamental peut être restreint lorsque, dans certains cas, il s’agit de protéger des valeurs ou des droits encore plus importants. C’est ainsi que, avec l’accord du Tribunal Constitutionnel, on a bien perquisitionné dans des rédactions et procédés à des écoutes dans le cadre de la lutte contre des crimes odieux. Dans le cas du terrorisme, les services secrets et les journalistes ont les mêmes « clients ». Pour le journal, dans certains cas, il est donc normal d’utiliser des journalistes comme source d’informations, lorsqu’il n’est pas possible de faire autrement.

La Süddeutsche Zeitung s’interroge : pendant toutes ces années, les responsables de la chancellerie ne savaient-ils vraiment rien de ces activités menés envers certains journalistes ou bien ont-ils plutôt préféré fermer les yeux et les tolérer ? Aujourd’hui déjà, un ancien ministre à la chancellerie et un ancien chef du BND se rejettent mutuellement et en public la responsabilité de ce scandale. Un scandale désormais public et qui pourrait bien provoquer la chutes de certaines personnalités, conclut le quotidien.