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La campagne présidentielle en France : et l´Europe dans tout ça?

30 mars 2007

La campagne électorale bat son plein en France, mais l’Europe, qui vient de fêter ses 50 ans y fait pâle figure. Que proposent les différents candidats pour sortir l’Europe de l’impasse après le « non » français au référendum ? Tour d’horizon dans cette édition.

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Dans l´impasse, la Constitution européenne ?
Dans l´impasse, la Constitution européenne ?Image : dpa

Deux ans après les "non" français et néerlandais, le projet de Constitution européenne est toujours en attente et il le restera vraisemblablement tant que l´on ne connaîtra pas le nom du nouveau Président de la République française. Mais que proposent à ce sujet les trois principaux candidats Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal et François Bayrou ? A Paris, Eva John a rencontré leurs principaux collaborateurs.

Le Luxembourgeois Jacques Santer, ancien Président de la Commission européenne, se félicite quant à lui que l’Europe ne soit pas otage de la campagne électorale française. Nous l’entendrons dans cette édition au micro de Johannes Bahrke.

Donner la parole aux citoyens européens : l’euro-député polonais Bronislaw Geremek n’a pas peur d’ouvrir la boîte de Pandore. Il est en faveur de la discussion la plus large sur le Traité constitutionnel.

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Le 25 mars dernier, les pays de l’Union étaient réunis à Berlin à l’occasion du cinquantième anniversaire du traité de Rome ; ils se sont accordés pour trouver avant les élections du Parlement de 2009 une issue à la crise institutionnelle. Mais dans la Déclaration de Berlin, pourtant, aucune allusion précise au projet de Constitution… Il faut dire que le sujet est un peu en « stand by » tant que l’on ne connaît pas le nom du nouveau président de la République française : deux ans après le non français au référendum, l’Europe attend beaucoup des programmes des présidentiables. Alors, que proposent Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal et François Bayrou pour relancer l’Europe sur le plan institutionnel?

A quelques semaines seulement du premier tour de l’élection présidentielle française, les candidats savent bien que toute l’Europe a les yeux rivés sur eux. A gauche comme à droite, la relance du traité est présentée comme un enjeu de premier ordre avant l’élection du Parlement européen en 2009. Mais dans tous les programmes, le terme de Constitution a disparu et c’est désormais d´un Traité constitutionnel dont il est question. Car tous les candidats s’accordent sur un point: il s’agit avant tout d’adapter les institutions à l’Europe des 27. Ecoutons l’eurodéputée Nathalie Griesbeck, membre de l’équipe de campagne de l’UDF François Bayrou :

« L’Europe, pour être forte et pour être politique, a besoin d’avoir des institutions adaptées, mais elle a des institutions pour une Europe à 15. Donc nous souhaitons continuer à travailler à élaborer une nouvelle proposition qui soit plus lisible, plus simple, plus concise et qui s’occupe surtout des institutions. »

« Faire plus simple », voilà un autre point de consensus entre les candidats français. Nicolas Sarkozy en a même fait son mot d’ordre, et c’est d’ailleurs un « traité simplifié » qu’il propose dans un premier temps, comme l’explique Alain Lamassoure, secrétaire national de l’UMP sur les affaires européennes :

« Au fond, ce dont nous avons besoin, c’est d’un traité qui permette de dire comment la politique européenne va être définie. C’est bien ce qui était prévu dans le cœur du projet constitutionnel. Nous proposons de rassembler ces dispositions sans changer la rédaction, c’est pourquoi nous utilisons l’image d’un traité à rédiger avec des ciseaux et pas avec un stylo. Donc on prend pour base le projet de Constitution et nous en faisons un traité ordinaire se présentant comme une modification du traité de Nice. »

Ciseaux pour les uns, stylos pour les autres, encore faut-il savoir ce qu’on garde, ce qu’on enlève et ce qu’on rajoute. Globalement, les trois principaux candidats proposent de reprendre le contenu des deux premières parties : la redéfinition des institutions de l’Union, les attributions d’un ministre des affaires étrangères, le passage de la règle de l’unanimité à celle de la majorité qualifiée, la Charte des Droits Fondamentaux.

Mais pour les socialistes, l’enjeu est avant tout de trouver un consensus à partir du premier texte.

Gilles Savary, député européen, est un proche collaborateur de Ségolène Royal :

« Il ne faut se priver de rien de ce qui fait consensus. Puisque tous les autres Etats membres l’ont ratifié, 18, il faut qu’on en garde le maximum. Ce qui fait consensus, c’est la partie 1, c’est la partie 2, et c’est tout ce qui dans la partie 3 n’a pas posé problème dans les débats français et néerlandais. Par exemple la coopération structurée pour la défense, la base juridique énergie et la base juridique service public. »

C’est la partie 3 du texte initial qui pose le plus de difficultés. Or, paradoxalement, ce sont les articles reprenant des traités déjà en vigueur qui ont été le plus controversés en 2005. D’où l’idée, à l’UMP comme au PS, de faire jouer le « principe d’additionnalité» : ne garder que les dispositions novatrices du projet de Constitution.

Autre point où les propositions de Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal se rapprochent : la nécessité d’améliorer la gouvernance économique européenne, et notamment le mode de fonctionnement de la Banque Centrale Européenne. Considérant l’Eurogroupe trop faible, ils souhaitent tous les deux une intervention politique dans les domaines économique et monétaire.

Du côté des socialistes, en revanche, pas question de se limiter à une série de coupes dans le texte. L’enjeu du nouveau traité résidera aussi dans un protocole social. Gilles Savary :

« Nous considérons que le décrochage des opinions publiques est lié à une grande peur de la concurrence interne, concurrence sociale et fiscale. Nous avons fait la paix des armes, ce qui est prodigieux, ce n’est pas pour faire la guerre civile des salaires. »

Reste enfin la question délicate de la forme de la ratification. Nicolas Sarkozy, qui tient à faire valoir l’urgence face au blocage institutionnel, prévoit de faire ratifier son traité simplifié par voie parlementaire. Pour Bayrou et Royal, en revanche, pas question d’imposer aux Français une ratification par le haut. Nathalie Griesbeck explique le choix de François Bayrou :

« Ce n’est pas seulement une question de parallélisme juridique, c’est une question politique et de respect de la démocratie. A partir du moment où les français ont été consultés, il nous parait absolument invraisemblable d’imaginer de ne pas reposer la question au peuple français. »

Gilles Savary, celui de Ségolène Royal : « Mme Royal propose un référendum parce qu’elle pense que si on n’en fait pas, alors on va développer un espace politique aux anti-européens et aux souverainistes ».

Le référendum, une solution démocratique, mais qui laisse tout de même entrevoir un risque de grave blocage au niveau européen. A l’UDF comme au PS, on espère que les Français saisiront l’enjeu et ne rejetteront pas une nouvelle fois le traité. En bref, on croise les doigts…

Eva John