Gerhard Schröder et la bioéthique
15 juin 2005En tête, la Frankfurter Rundschau. Certes, le discours du chancelier a été planifié bien avant la décision de procéder à des législatives anticipées. Et puis, le sujet est bien trop controversé dans tous les partis politiques pour être réellement instrumentalisé. Cependant, avec son annonce programmatique, le chancelier marque sa différence avec Angela Merkel : impossible maintenant de lui reprocher une quelconque indifférence face à ce secteur d’avenir qu’est la biotechnologie.
Die Welt par contre souligne que jusqu’ici, les lignes de conflit en termes de bioéthique ne suivaient pas celles des camps politiques. On ne s’affrontait pas entre fractions parlementaires mais entre partisans de telle ou telle éthique. La prise de position claire du chancelier remet les choses en place. D’un côté, la sociale-démocratie et un centre bourgeois libéral, de l’autre les chrétiens et les conservateurs. Ce réalignement sera bénéfique, explique le quotidien. D’une part, les propositions de loi seront plus cohérentes. D’autre part, le processus démocratique récupérera un terme important.
La Frankfurter Allgemeine Zeitung souligne l’erreur de Gerhard Schröder en la matière, en citant sa devise de la « nécessité de toujours devoir décider de nouveau ». En matière de principe, comme la peine de mort ou la protection de l’embryon, les décisions n’ont pas à être « toujours remises en question » car cela annule la raison d’être du principe qui les fonde. Même le récent succès des scientifiques coréens ne prouve pas, et de loin, qu’il suffise de tuer suffisamment d’embryons pour être certain d’éradiquer un jour la maladie d’Alzheimer ou de guérir les paraplégiques.
La Süddeutsche Zeitung relève que la Constitution allemande place la dignité de l’Homme et de la Vie au-dessus de toute loi. Elle cite le philosophe Jürgen Habermas pour qui permettre que l’embryon devienne matériau de recherche nous engage sur la pente glissante d’un eugénisme libéral. Il avait raison. Dans certaines régions du monde, la représentation de l’être humain est déjà en train de se modifier. En prononçant sa phrase, « il en va de l’avenir de l’Homme », Gerhard Schröder n’y mettait certainement pas ce sens-là. Et pourtant, c’est vrai, conclut le journal : pour ce qui concerne la recherche sur l’embryon, il y va de l’avenir de l’Homme.