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Economie

En Guinée, l'Etat achète la paix sociale

14 mars 2018

Fin de la grève des enseignants contre une hausse des salaires. Voilà comment l'Etat va financer cette promesse.

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Kinder gehen zur Schule in Conakry Guinea 19.01.2015
Image : AFP/Getty Images/C. Binani

En Guinée, le gouvernement guinéen a cédé sur les revendications des enseignants par une hausse de 40% de leurs salaires. Ce qui met fin à une grève de plus d'un mois dans le secteur de l'éducation nationale. Quel est l'impact financier de cette concession?

Un vieil accord 

Pour comprendre le fond du problème, il faut remonter à l'accord signé entre les deux parties en 2016. A l'époque, le gouvernement avait accepté d'augmenter l'indice salarial des enseignants à hauteur de 40% avant de procéder à un recensement biométrique qui avait permis aux autorités de détecter plusieurs milliers de fonctionnaires fictifs.

Ecolières de Conakry
L'école reprend pour les enfants du pays après plusieurs semaines d'interruptionImage : AFP/Getty Images/S. Kambou

La paupérisation de la jeunesse a obligé l'Etat à faire de nouveaux recrutements de jeunes fonctionnaires. Pour ne pas entraver le programme avec les institutions financières comme le FMI et la Banque mondiale, Conakry a donc ignoré son accord passé avec le Syndicat des enseignants libres de Guinée.

En clair, au lieu de payer les 40%, le gouvernement a proposé un paiement échelonné de 10%  par an. Bakary Kanté, chargé de cours de commerce international à Conakry, chiffre l'augmentation promise à "500 milliards de francs guinéens par an (44,9 millions d'euros ndlr). Mais le gouvernement n'a pas pris en compte ces dépenses car le budget annuel a déjà été adopté. Or avec le FMI, il faut respecter les dépenses. Et là il va y avoir un dépassement," avait souligné Conakry.

 

Autres conséquences de cette augmentation de la masse salariale: c'est l'inflation à 2 chiffres dans les mois à venir. Le taux de pression inflationniste actuelle en fin 2017 est de 9,3%. Des coupes budgétaires et voire la restructuration du gouvernement sont envisagées. Déjà des rumeurs d'une augmentation du prix du litre à la pompe et du maintien de l'augmentation de la taxe sont déjà adoptées dans le budget.

Bretton Wood veille au grain

Les autorités guinéennes ont désormais les yeux rivés sur le prochain conseil d'administration de la Banque Mondiale et du Fonds monétaire international, le 6 avril prochain.

Selon docteur Makanera Kaké, l'accord signé entre le gouvernement et les syndicats pourrait n'avoir aucun effet négatif sur le budget 2018. A condition toutefois que le gouvernement coupe dans le train de vie de l'Etat.

Alpha Condé
Alpha Condé va devoir réduire le train de vie de l'Etat, selon le Dr. MakaneraImage : DW

L'économiste prône une "nouvelle répartition des crédits budgétaires. Essayez de voir le budget, la loi de finances 2018, vous allez vous rendre qu'il y a certains cabinets ministériels – quand on parle de cabinet ministériel c'est six ou sept personnes selon la loi – qui disposent de 4.000 litres de carburant par jour. Si vous calculez, si on donne 4.000 litres par jour, il n'y a aucun ministère qui ne dépasse pas les trois milliards qu'on appelle ensemble non ventilé, c'est-à-dire les crédits gardés par l'ordonnateur pour usage personnel."

Il faut souligner que le budget annuel de l'Etat atteint en 2018 un montant de plus de deux milliards d'euros, une première dans l'histoire de la Guinée.