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Elections ce dimanche en Birmanie

5 novembre 2010

Ce sont les premières depuis 1990. A l'époque, la junte militaire au pouvoir avait connu une lourde défaite électorale. Mais les généraux avaient purement et simplement refusé de reconnaitre leur défaite.

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Thein Soe, président de la Commission électoraleImage : AP

Refusé aussi, donc, d'admettre la victoire de l’opposition, emmenée par Aung San Suu Kyi. La junte avait alors placé l’opposante en résidence surveillée. Cette fois, les généraux se présentent en civil. Mais ils se sont réservé d’avance un quart des sièges du Parlement et ont mis des conditions draconiennes à la participation de l’opposition. Avant même la tenue du scrutin, la diaspora birmane parle déjà d’ une " mascarade destinée à doter le régime militaire d'un vernis civil et parlementaire".

La Birmanie est un pays à l’économie exsangue, la majorité de la population vit dans la misère, le système éducatif est plus que défaillant tout comme le système de santé. La junte militaire au pouvoir commet quasi quotidiennement de graves atteintes au droits de l’Homme. Pour Henning Effner, directeur de projet pour la Birmanie à la Fondation Friedrich Ebert, la junte est de moins en moins légitime:

„Les militaires gouvernent maintenant depuis plus de 20 ans par décret, et ces élections leur donnent la possibilité de mettre un vernis démocratique à leur junte face aux critiques internationales."

"Pourtant la réalité n’a rien à voir avec la démocratie", estime Henning Effner

Tout le processus électoral a été organisé de manière arbitraire par les militaires: de l’enregistrement des partis à la campagne électorale, en passant par la nomination des candidats. Par ailleurs, une loi interdit à toute personne ayant fait de la prison de se porter candidat. Une loi sur mesure pour écarter d’emblée la chef de file de la Ligue Nationale pour la Démocratie, ou NLD, le plus grand parti d’opposition , Aung San Suu Kyi, enfermée ou sous surveillance depuis 20 ans. Le pays compte d’ailleurs plus de 2000 prisonniers politiques. La NLD a décidé de boycotter les élections, ce qui a entraîné sa dissolution par la junte. Aung San Suu Kyi est toujours en résidence surveillée. Elle pourrait être libérée après les élections. Pour les autres petits partis, il est également difficile de se présenter. Chaque candidat doit s’acquitter de frais d’inscription de 500 dollars américains, plus que le salaire annuel moyen en Birmanie! Henning Effner:

Aung San Suu Kyi
Aung San Suu Kyi, chef de file de l'opposition et Prix Nobel de la PaixImage : AP

„Si on fait le compte, un parti qui veut présenter des candidats pour tous les sièges doit payer presque 600.000 US-Dollar de contributions . C’est là une barrière infranchissable pour un parti d’opposition ."

La constitution imposée par la junte en 2008 prévoit la mise en place de nouvelles institutions comme des parlements et gouvernements régionaux dans 14 provinces du pays. Mais dans les faits, elle assure l'emprise des militaires sur le parlement national, comme le souligne Jasmin Lorch, de la Fondation Sciences et Politique à Berlin:

La constitution garantit par exemple un quart des sièges aux militaires, et la junte dispose ainsi d’une minorité de blocage au Parlement. Les militaires peuvent alors bloquer un changement de constitution au Parlement."

La Birmanie est un état multi-ethnique

130 minorités environ y vivent. Nombreuses sont celles qui réclament davantage d’autonomie. Aussi de nombreux groupes ethniques ont fondé des partis politiques pour participer à ces élections dans l’espoir -illusoire?- de promouvoir leur propre langue, culture et identité.

Flash-Galerie Birma
Femme sur le marché de KalawImage : DW/Tropper

La junte ayant refusé l'accès du pays aux observateurs et journalistes étrangers pour ces élections, les résultats officiels, attendus dans le courant de la semaine prochaine, seront, pour le moins, sujets à caution.

Auteur : Ana Lehman / Philippe Pognan
Editeur: Sandrine Blanchard