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Cameroun: de nouvelles charges pèsent sur Patrice Nganang

12 décembre 2017

La justice camerounaise poursuit désormais l'écrivain Patrice Nganang pour immigration clandestine, faux et usage de faux, ainsi que menace de mort à l'encontre du Président de la République.

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Schriftsteller Patrice Nganang
Image : Stimmen Afrikas

Cameroun: de nouvelles charges pèsent sur Patrice Nganang - MP3-Stereo

Selon, Me Emmanuel Simh, l’avocat de Patrice Nganang, la Direction de la Police judiciaire a notifié lundi à son client la prorogation de sa garde à vue de 48 heures supplémentaires. Et les charges ''d'outrage au chef de l'Etat", pour des propos jugés injurieux postés sur Facebook, cette infraction a été abandonnée, contre de nouvelles infractions : immigration clandestine, faux et usage de faux, terrorisme ainsi que de menace de mort à l'encontre du Président de la République.

En clair, on reproche notamment à l’enseignant en théorie littéraire à l’université de New-York d'être entré au Cameroun sans visa, alors qu'il est de nationalité américaine, la loi camerounaise prescrivant la double nationalité.

L’interview de Me Emmanuel Simh - MP3-Stereo

 "La loi camerounaise n'interdit pas qu'une personne puisse avoir deux passeports. Elle dit simplement que si elle a un deuxième passeport, cela suppose qu'on a renoncé à la nationalité camerounaise. Et il n'y a qu'un juge civil qui a le pouvoir et la compétence d'annuler le passeport camerounais", explique son avocat Maître Emmanuel Simh . "Et donc, tant qu'un juge n'est pas saisi pour annulation du passeport camerounais, il reste valable. M. Nganang se considère entièrement comme un Camerounais. M. Nganang estime qu'étant né à Yaoundé, on ne peut pas le poursuivre à Yaoundé d'immigration clandestine. Ca n'a pas de sens pour lui. Son passeport américain lui sert simplement pour des raisons professionnelles. Pour lui, il se battra jusqu'au bout. Et je pense qu'il a raison, pour que cette loi, qui est une loi qui est absolument abjecte, ce qui est contesté aujourd'hui par la classe politique, la société civile et même le clergé. Que cette loi soit abolie. Qu'on puisse avoir un passeport étranger et ne pas pour cela être Camerounais."

La réaction du Ministre camerounais de la Communication et porte-parole du gouvernement ne s'est pas fait attendre: "notre Constitution ne reconnaît pas la double nationalité. Ou il est Camerounais, et dans ce cas, le passeport américain est inacceptable, quand bien même il serait bon, ou il est Américain, et dans ce cas, il est déchu de sa nationalité d’origine, à savoir la nationalité camerounaise. Ni l’origine, ni le statut sociétal ne confère un passe-droit qui vous placerait au dessus de la loi. Nous sommes un Etat de droit " , a répliqué au micro de la Deutsche Welle, Issa Tchiroma Bakary.

Genèse de l’arrestation de Patrice Nganang

L’écrivain, qui réside aux Etats-Unis,  a été interpellé le 6 décembre dernier à l’aéroport international de Douala. Il s’apprêtait  à embarquer pour Harare au Zimbabwé par un vol de la  compagnie Kenya Airways. Juste après son arrestation, Patrice Nganang, auteur du roman "Temps de chien", prix Marguerite Yourcenar et Grand prix de la littérature d'Afrique noire, a été conduit à Yaoundé où il a  été auditionné pendant plus de cinq heures samedi dernier à la Direction de la police judicaire de Yaoundé. Et son avocat Me Emmanuel Simh est formel : son client a été interpellé sur instruction du délégué général à la Sûreté nationale, Martin Mbarga Nguelé.

Quelques jours avant son arrestation, Patrice Nganang a publié une Tribune dans l’hebdomadaire Jeune Afrique, et y a dénoncé l’amateurisme avec lequel le président Paul Biya gérait la crise qui secoue depuis novembre 2016 les deux régions anglophones, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. Et que par conséquent, seul un changement à la tête du Cameroun pourrait résoudre la crise anglophone.

Son arrestation a suscité une onde de réactions au Cameroun, en Afrique et dans le monde. Un collectif d'écrivains africains et occidentaux et des défenseurs des droits de l'homme ont appelé vendredi à la libération de l'auteur camerounais. Le Réseau des défenseurs des droits humains en Africain centrale (Rédhac) et Tribunal Article 53, une association locale de défense des droits humains, ont, eux aussi  dans un communiqué dénoncé "l'enlèvement, l'arrestation et la détention arbitraire" de M. Nganang. Elles demaneant aux autorités de le "libérer sans condition et dans l'immédiat".

DW MA-Bild Eric Topona
Eric Topona Journaliste au programme francophone de la Deutsche WelleETopona