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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron18 novembre 2005

Libéria – Habré - Gabon

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Ellen Johnson-Sirleaf
Ellen Johnson-SirleafImage : AP

Les journaux allemands se montrent impressionnés, et agréablement surpris, par l’élection d’une femme à la tête de l’Etat au Libéria. Le Libéria, pionnier politique en Afrique, titre la Frankfurter Rundschau, après la victoire annoncée d’Ellen Johnson Sirleaf à l’élection présidentielle. Peu de temps après l’Allemagne, mais à des années lumière encore devant les Etats-Unis, l’Afrique a élu pour la première fois une femme à la tête d’un pays. Ce continent prétendument si arriéré a remporté une bataille historique sur le terrain de la lutte des sexes. Au Libéria, poursuit le journal, les chances semblaient pourtant minces pour une grand-mère comme Ellen Johnson Sirleaf. Son rival, l’ex-footballeur George Weah, 39 ans, n’était-il pas la fierté de l’Afrique et l’idole de la jeunesse de son pays ? Que les Libériens aient préféré l’ancienne économiste de la Banque Mondiale à un conducteur de Porsche sans expérience politique permet d’espérer pour l’avenir, souligne le journal. Après 14 années de guerre civile, ils méritent mieux qu’un éternel déclin. Un footballeur n’aime pas perdre, note de son côté la Süddeutsche Zeitung. Moins encore lorsque son adversaire est une femme. La victoire surprise de Mme Johnson-Sirleaf ne fait pourtant aucun doute, même si les résultats définitifs n’ont pas encore été officiellement annoncés, écrit le journal dans son édition de lundi dernier. Elle faisait figure d’outsider contre un George Weah acclamé comme un messie par ses partisans. Lesquels étaient certains que leur idole serait capable de reconstruire le pays du jour au lendemain, alors même qu’il n’est allé que très peu de temps à l’école et qu’il n’a aucune expérience politique. Certes poursuit le journal, la majorité des Libériens ne savent ni lire ni écrire, mais ils savent que leur pays en ruine a besoin d’un professionnel de la politique. Je dirais même une professionnelle.

L’arrestation au Sénégal, de l’ancien président tchadien Hissène Habré, ne passe pas non plus inaperçue dans la presse allemande. La Frankfurter Rundschau fait notamment le rapprochement avec Pinochet, l’ancien dictateur chilien. Et pour cause. Aux yeux des organisations de défense des droits de l’homme, Hissène Habré est le « Pinochet de l’Afrique ». Lorsqu’il était au pouvoir au Tchad dans les années 80, écrit le journal, Hissène Habré aurait ordonné l’assassinat de dizaines de milliers d’opposants et soumis des centaines de milliers d’autres aux pires tortures. Les Etats-Unis à l’époque ne se sont jamais souciés de son régime de terreur, Habré ne combattait-il pas le Libyen Khadafi ? En exil au Sénégal depuis sa chute en 1990, Hissène Habré, comme Pinochet, a échappé jusqu’à présent à la justice, note le journal. En 2001 la justice sénégalaise s’est déclarée incompétente pour juger des crimes commis au Tchad. A présent les victimes survivantes espèrent de nouveau. Habré a été arrêté au Sénégal. A cause de la Belgique qui demande énergiquement son extradition. Reste à savoir, conclut le journal, si cela impressionnera les juges suprêmes au Sénégal.

Enfin la presse allemande évoque cette semaine une curieuse affaire. Elle concerne les relations entre les Etats-Unis et le Gabon. On peut lire en première page de la Frankfurter Rundschau qu’un lobbyiste américain très contesté, Jack Abramoff, aurait proposé au président Omar Bongo de lui organiser, pour neuf millions de dollars, une rencontre avec George W. Bush. Bongo devait verser l’argent sur le compte d’une firme appartenant à Abramoff. Une commission d’enquête du sénat américain a publié une lettre dans laquelle Abramoff écrivait à Omar Bongo « qu’il avançait prudemment ». La lettre est du 7 août 2003. Bush et Bongo se sont rencontrés le 26 mai 2004. Certes, écrit le journal, rien n’indique pour l’instant que Jack Abramoff ait effectivement reçu de l’argent du Gabon. Il ne serait pas non plus illégal que le gouvernement d’un petit pays sollicite les services d’un lobbyiste à Washington pour obtenir des rendez-vous auprès du gouvernement américain. Ce qui fait quand même dresser l’oreille, souligne le journal, c’est le montant : neuf millions de dollars.