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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron8 juin 2007

G8/Afrique – Procès Taylor – Afrique/Drogue

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Angela Merkel avec des participants au G8
Angela Merkel avec des participants au G8Image : AP

Si le sommet du G8 en Allemagne est maintenant terminé, les journaux ont continué cette semaine de commenter les bienfaits et les méfaits de l’aide au développement pour l’Afrique.

A l’heure où paraît cette Afropresse il est encore un peu tôt pour avoir les commentaires sur tous les résultats de cette rencontre. Tout au plus peut-on signaler, à propos du compromis sur le climat, que la Süddeutsche Zeitung parle d'un tournant, alors que la Frankfurter Rundschau n’y voit qu’une déclaration d’intention. Mais l’aide à l’Afrique, l’un des thèmes donc du sommet, continue de diviser les esprits dans la presse allemande. La Frankfurter Allgemeine Zeitung par exemple doute de l’utilité de nombreux projets de développement menés en Afrique avec l’aide occidentale. Certes les pays donateurs examinent de plus près ce qu’il advient de leur argent. Mais il en résulte une bureaucratie proprement kafkaïenne dont on ne peut apparemment venir à bout qu’avec un nombre encore plus de spécialistes et une armée de consultants. Exemple le Mali, poursuit le journal, le Mali où se bousculent pas moins de 33 organisations d’aide nationale, 22 agences multilatérales et une centaine d’organisations non gouvernementales. Toutes veulent être contrôlées. Or selon une enquête de l’OCDE, 600 projets de développement sont menés simultanément dans chacun des pays du Sahel (entendez par là le Mali, le Sénégal, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad). A raison d’un rapport de suivi par trimestre, cela fait 2 400 rapports par an. Concernant l’aide allemande, note un peu plus loin le journal, elle s’oriente de plus en plus vers une coopération technique tournant autour de l’envoi d’experts. Cette coopération technique est certes fournie au Mali au titre des subventions non remboursables, mais cela ne change rien au fait qu’une bonne partie de l’aide au développement est allouée au paiement de ses propres experts.

Qui a tort, qui a raison, faut-il supprimer l’aide, s’interroge la Süddeutsche Zeitung. Une chose est sûre, estime le journal: sans aide de l’extérieur, il y aurait encore plus de morts en Afrique et de nouvelles guerres éclateraient. Il est donc utile que des experts continuent à construire des centrales hydrauliques, que des agronomes cherchent à accroître les rendements agricoles, que des médecins aillent vacciner des enfants. En réalité, poursuit le journal, il importe de combattre plus sévérement les abus. L’Afrique a besoin d’une justice plus forte, d’une presse vigilante et d’outils pour contrôler les flux financiers.

Dans l’actualité africaine, la presse allemande se fait l’écho cette semaine de l’ouverture du procès de l’ancien président du Libéria. Charles Taylor comparait à La Haye devant le tribunal spécial pour la Sierra Leone. Il est inculpé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

Une mauvaise journée pour les tyrans, titre la Frankfurter Rundschau. Le procès de Charles Taylor est un signal à l’adresse des chefs de guerre, d’hier et d’aujourd’hui, propulsés à la magistrature suprême. Il devrait être un avertissement, aussi bien pour le Zimbabwéen Robert Mugabe que pour l’Ethiopien Mengistu, condamné en janvier en Ethiopie à la détention à vie et actuellement "hôte" de Mugabe. Cela dit, souligne le journal, même si Charles Taylor est condamné, la communauté internationale n’aura aucune raison de s’estimer quitte. Une justice exemplaire pour l’Afrique signifierait que Taylor ne soit pas le seul à être qualifié de "monstre", mais que les trafiquants européens de diamants, de bois et d’armes, qui l’ont aidé dans ses agissements criminels, soient également traduits en justice.

Enfin la saisie, le mois dernier en Mauritanie, de 600 kilos de cocaïne fait écrire à la presse allemande que l’Afrique constitue aujourd’hui un nouveau front dans la guerre contre le trafic de drogue.

Carte à l’appui, la Frankfurter Allgemeine Zeitung explique en effet comment la quasi totalité des pays de l’Afrique de l’ouest, autour du Golfe de Guinée et le long de la côte atlantique, de même que le Maroc et la Libye, sont intégrés dans le trafic de cocaïne entre l’Amérique du sud et l’Europe. Le 2 février dernier, note le journal, Interpol a adressé un avis d’alerte à la cocaïne à tous ses bureaux de liaison. Il y est question d’une saisie de drogue à l’aéroport de Casablanca et d’un nombre grandissant d’Africains, originaires de Conakry et de Bamako, qui voulaient emprunter des vols de Royal Air Maroc à destination de l’Espagne – tous avec 50 à 100 paquets de cocaïne dans les intestins. Mais les plus nombreux restent les Nigérians. Depuis quelques années, poursuit le journal en se référant à Europol, la police européenne, le contrôle des voies maritimes directes entre les Caraïbes et l’Europe de l’ouest s’est amélioré. Il est plus risqué d’expédier de la drogue en Europe à partir des ports colombiens et vénézuéliens, ou des Antilles néerlandaises. Pourquoi donc ne pas choisir l’Afrique et y stocker temporairement la cocaïne jusqu’à ce qu’elle trouve preneur en Europe, puis la transporter soit par l’Atlantique, soit au travers de l’Afrique du nord en alliant la voie terrestre et la voie aérienne. De Nouakchott à Lomé, souligne le journal, c’est toute la région qui est menacée. Avec ses policiers mal payés ou pas payés du tout, ses politiciens corrompus, ses aérodromes isolés et ses métropoles comme Dakar ou Lagos pour blanchir l’argent de la drogue, l’Afrique de l’ouest offre un environnement idéal.