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Afropresse, l’Afrique à travers la presse allemande

Marie-Ange Pioerron2 novembre 2007

Tchad – RDC –APE

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Tchad/Arche de Zoé -Quelques-uns des enfants concernés
Tchad/Arche de Zoé -Quelques-uns des enfants concernésImage : picture-alliance/dpa

L’affaire franco-tchadienne des 103 enfants que l’ONG Arche de Zoé voulait confier à des familles européennes a fait couler beaucoup d’encre cette semaine dans les journaux allemands. La Tageszeitung de Berlin tout d’abord ne consacre pas moins d’une page à cette affaire qui continue de soulever bien des questions. Les bienfaiteurs autoproclamés français, écrit le journal, ont surtout sous-estimé la colère suscitée au Tchad par leur opération. L’indignation y est unanime et peut se résumer en ces termes: l’Europe ferme ses frontières et contraint des réfugiés africains à risquer leur vie via l’Atlantique ou la Méditerranée, mais des Européens peuvent à leur guise faire venir chez eux des enfants africains. La Frankfurter Allgemeine Zeitung dénonce quant à elle le double jeu du président tchadien. Idriss Déby s’est dit indigné et inquiet du sort qui aurait été réservé à ces 103 enfants. A l’évidence, souligne le journal, il se fait moins de souci pour un nombre infiniment plus grand d’enfants dans son pays. Son gouvernement a promis au début de l’année de démobiliser des milliers d’enfants soldats enrôlés dans l’armée et des unités paramilitaires. Mais selon Human Rights Watch, rien n’a été fait. L’utilisation d’enfants soldats continue au Tchad et le régime ne se donne même pas la peine de le camoufler. Pour la Frankfurter Rundschau, il serait fatal que l’affaire de l’Arche de Zoé au Tchad se traduise par un arrêt général des adoptions inter-culturelles. Il y a en Afrique plus de 43 millions d’orphelins, écrit l’auteur de l’article, lui-même père adoptif de deux enfants africains. On affirme souvent que ces orphelins trouvent toujours une place quelque part au sein de la grande famille africaine. Cela fait longtemps que ce n’est plus le cas, non seulement dans les régions où l’épidémie de sida est la plus virulente. En témoignent les centaines de milliers d’enfants des rues de Kinshasa ou de Nairobi, de même que les orphelinats bondés du Malawi et de l’Afrique du sud. Cela dit un autre article, toujours dans la Frankfurter Rundschau, nous apprend que sur les 48 pays de l’Afrique subsaharienne, huit seulement ont signé la Convention de La Haye sur l’adoption.

Autre sujet cette semaine dans les journaux: la République démocratique du Congo. Un an après les premières élections libres en RDC, et les espoirs qu’elles avaient suscités, la presse allemande se dit franchement pessimiste.

La Tageszeitung n’hésite pas à titrer sur la troisième guerre du Congo. Ces deux derniers mois, écrit le journal, 200 000 personnes ont perdu leur foyer au Nord-Kivu, dans l’est du pays. C’est le drame de réfugiés qui à l’heure actuelle s’amplifie le plus rapidement. Mais pour les victimes de cette nouvelle guerre il n’y a ni initiative de paix, ni aide, ni protection. Depuis la victoire électorale de Joseph Kabila le 29 octobre 2006, poursuit notre confrère, il y a eu plus de conflits armés et de morts que pendant les trois années de la transition. La nouvelle guerre dans le Nord-Kivu est l’indice le plus visible qu’après les deux guerres dévastatrices qui ont sévi entre 1996 et 2003, un troisième conflit fait rage au Congo. Mais souligne le journal, cette fois-ci l’enjeu n’en est plus le pouvoir à la tête de l’Etat. Aujourd’hui personne ne conteste sérieusement la légitimité du gouvernement élu. Il y va de l’affirmation de soi-même vis-à-vis de l’Etat et de la coexistence entre groupes locaux concurrents. Ceci étant, la Tageszeitung note dans un autre article que les combats et la montée de la criminalité au Nord-Kivu font réagir la population civile. Il y a , écrit le journal, une multiplication des protestations et des opérations d’autodéfense. Les gens ne font plus confiance à l’Etat pour assurer leur sécurité.

Enfin la presse allemande se penche sur les accords de partenariat économique que l’Union européenne est en train de négocier avec les pays ACP. Les discussions vont entrer dans leur dernière phase, et les pays africains s’inquiètent. A en juger par ce qu’écrit la Tageszeitung, ils ont des raisons de craindre ces accords de partenariat économique qui devraient entrer en vigueur début 2008. Une guerre commerciale s’annonce entre les plus riches et les plus pauvres de ce monde, souligne le journal. C’est l’avenir des relations euro-africaines qui est en jeu. Les 77 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, explique le journal, bénéficient actuellement d’un régime préférentiel dans leur accès au marché européen. Mais la dérogation donnée pour ces clauses préfentielles par l’Organisation mondiale du commerce expire fin 2007. Ne seront plus autorisés par la suite que de véritables accords de libre-échange, par lesquels les deux partenaires ouvriront leurs marchés. Les pays en développement devront donc ouvrir beaucoup plus largement leurs marchés aux produits européens. Et cela aura des conséquences dramatiques pour l’Afrique, estime la Tageszeitung. Beaucoup de pays africains redoutent l’effondrement de leur production locale. Les importations bon marché de blé, de fruits et de viande en provenance d'Europe ruinent d’ores et déjà de nombreux paysans africains. Deux commissaires européens, Peter Mandelson pour le commerce et Louis Michel pour l’aide au développement signent conjointement un article dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung pour dissiper les craintes des pays ACP. Les accords de partenariat économique que l’UE négocie actuellement avec les six régions d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique transformeront une relation commerciale basée sur la dépendance en une relation commerciale s’appuyant sur la diversification économique et la croissance, soulignent les deux commissaires. Non seulement, notent-ils plus loin, les pays ACP continueront à recevoir chaque année plusieurs centaines de millions d’euros d’aide au développement, mais ils seront aussi parmi les principaux bénéficiaires de la décision qui porte à 2 milliards d’euros par an le montant des dépenses européennes consacrées à l’aide commerciale.